19 juin 1940 à Tarare Rhône

Bonjour,

Mon père était le 19 juin 1940 à Tarare.
Il a combatu.
Il était dans l'infanterie.
Il commandait une section de mitrailleuse.
Il a été arrêté ce jour là et fait 5 ans de captivité.
Avez vous des éléments sur cette bataille.

Merci

bonjour

Il y'a une page sur Tarare chez Gilles Ragache dans
La fin de la campagne de France - les combats oubliés des Armées du Centre 15 juin-25 juin 1940*
Economica

une section de mitrailleuses ne signifie pas qu'il s'agisse ipso facto d'un Bataillon de Mitrailleurs

à Tarare le 19 juin 1940 l'unité en question est un Bataillon de marche mis sur pied par le Dépôt d'Infanterie 131 de Saint Etienne (les Dépôts de guerre sont des centres d'instruction pour les jeunes recrues)

il évoque ce bataillon de marche de la 131e DI [une coquille, c'est le Dépôt d'Infanterie 131] formé le 16 juin à Saint Etienne acheminé par autocars avait établi des barricades bloquant les principaux accès de la ville  
489 fantassins commandés par le Capitaine Noguès secondé par 4 lieutenants Amiot, Gorce, Lac, Courtin,
équipés d'une dizaine de fusils-mitrailleurs et six mitrailleuses ils s'opposèrent de leur mieux aux allemands, trois des barricades tombèrent assez rapidement après une brève résistance mais la barricade ouest qui contrôlait la N7 en direction de Roanne résista plusieurs heures contre des forces bien supérieures en nombre. La barricade tomba vers 18h30.
Le rapport de Gendarmerie  signala "que les allemands auraient été guidés dans Tarare par des habitants de la ville pour prendre les barricades à revers" fait confirmé par le lieutenant Amiot qui commandait le groupement...
*pages 114-115

Salutations
Loïc L.

Bonjour,

Merci beaucoup c'est une information précieuse.
Il parle d'un Sergent Bouvier.
Peux t'on trouver la liste du bataillon de marche de la 131e DI ?
 
Salutation.

Bonjour,

En toute logique effectivement les seules troupes présentes à Tarare le 19 juin sont bien des soldats du DI 131 qui étaient arrivés le 17 juin. Il s'agissait de l'unité située la plus à l'ouest du dispositif de défense des abords de Lyon confié au Général de Mesmay.

Les combats ont eu lieu avec les élements de reconnaissance de la division SS Totenkof (SS-Totenkopf-Aufklärungs-Abteilung).

Les barrages situés au Nord et à l'Est sont tombés rapidement. Celui de l'Ouest, doté d'une mitrailleuse, sur la route de Tarare, a longuement résisté mais a cédé sous les coups des tirs de 37 mm ennemis. Le Lieutenant français a été grièvement blessé et ne sera pas soigné par les SS... Il le sera par les habitants. Une dizaine de tués chez les SS, dont l'officier de ce groupement. A ce jour, je n'ai relevé que des pertes insignifiantes coté français (sauf que le détachement a été fait prisonnier et sera enfermé dans l'église).

Je reviendrai donner d'autres précisions.

Cordialement

Eric

Bonjour,

Merci mon père écrit qu'il a infligé sous son commandement 95 pertes chez l'ennemie et deux tués parmis eux.
Il dit avoir passer un mauvais quart d'heure lorsqu'il a été arrêté car les Allemands voulaient se venger.
De plus la division SS Totenkof était plus que violente.
Enfin cette mémoire ne semble inscrite nulle part.

Codialement.
Cordialement

Bonjour,

Comme promis quelques précisions :

A Tarare, il s'agit de la 32ème Cie du DI 131 ( Lieutenant Amiot).

A l'ouest, à la barricade qui a résisté sur la route de Roanne, l'aspirant Durieux et le sergent Bouvier sont blessés. Aujourd'hui cette route s'appelle  "route du barrage".

Selon les sources allemandes, les SS ont 5 blessés mais également 5 tués, dont un sous-off et le capitaine (hauptsturmführer) Kemmetmüller.

2 civils furent tués pendant les combats.

Après la chute de la ville, un soldat français (agent de liaison) fut tué aux abords sud de la ville et les SS prirent des notables en otage qui ne furent libérés que le 22 juin.

Les soldats français furent enfermés dans l'église de La Madeleine (quasiment pas nourris, pas soignés et sans sanitaire...). Ils en sortiront les 23 et 24 juin pour se rendre ensuite au camp de prisonniers de Longvic Dijon.

De l'église, grace à des habitants, quelques soldats purent s'enfuir.

Il existe un livre sur Tarare pendant la seconde guerre : de Pierre Gouttard, le sang des ombres. A lire aussi la Totenkopf de Charles Trang chez Heimdal, bien que le passage sur Tarare soit assez bref.

Quel était le grade de votre père ? S'agit-il du sergent Bouvier ?

Je suis fort attentif à vous lire.

Voila voila

Cordialement

Eric

Bonjour à tous,

  J'ai découvert fortuitement ce fil de discussion et cela correspond à ce que mon grand-père (1912-1995) m'a raconté lorsque j'étais enfant. Il a tenu sa position "cinq heures jusqu'à épuisement des munitions" ce qui lui a valu nombre de citations et de décorations. Comme je me le rappelle, son sergent et son aspirant dont j'ignore les noms, ont été mis hors de combat assez rapidement ; des blessures très sérieuses laissant penser à mon grand-père qu'ils étaient sans doute tués (une balle dans la mâchoire pour le sergent). Mon grand-père _ seconde classe _ désespérant de  pouvoir s'échapper sans se faire tirer dessus comme un lapin, choisit l'option "feu à volonté" et causa de grands dégâts chez l'ennemi. Il avait un atout de taille : il était Alsacien donc germanophone, et comme je l'ai entendu, les combattants étaient très rapprochés, de sorte que mon grand-père percevait parfaitement les ordres hurlés par les Allemands ce qui fait qu'il pouvait anticiper leurs mouvements... Il leur mis hors de combat beaucoup de gens, et à un moment surgit un officier "doré sur tranche" dans un side-car ; mon grand-père prit peur car il se doutait que le gaillard pouvait trouver un moyen de prendre sa position, il fit feu sans hésiter "et d'une rafale de mitrailleuse, le coupa en deux au niveau de la poitrine, tandis que le pilote mortellement atteint tombait de la machine sur sa gauche, l'attelage cala en effectuant un brusque demi-tour". Cela porta un grand coup au moral des ennemis, et mon grand-père les entendit crier : "Das ist Teufel ! Das ist Teufel !" (C'est le diable!). Arrivé à court de munitions, mon grand-père craignant toujours de se prendre une balle dans le dos s'il quittait sa position, attendit la décision du destin ; de leur côté, les Allemands échaudés attendaient eux aussi. A la fin, un soldat ennemi réussit à contourner sa position et à le faire prisonnier : c'était un Autrichien. Mon grand-père fut aligné avec d'autres Français contre un mur, les Allemands prenant plaisir à les effrayer de façon macabre, faisant mine de les fusiller... Peu de temps après survinrent deux officiers allemands, amis de l'officier abattu, ils l'interrogèrent et quand ils apprirent qu'il était Alsacien, lui débitèrent leur propagande sur la "Gross Deutschland", ce à quoi mon grand-père leur répondit dans la langue de Goethe : "Vous voyez mon uniforme : c'est un uniforme français. Je suis Français !" ; fous de rage, ils le passèrent à tabac, le laissant inanimé sur le plancher ; un médecin fut dépêché pour le soigner (c'était un Wurtembourgeois) qui lui dit : "Méfie-toi des gens comme eux, ce sont des fanatiques !". Mon grand-père connut encore nombre d'aventures durant cette triste période puisqu'il réussit à s'évader de façon rocambolesque mais je garde en souvenir ce nom : "Tarare"...

Merci Larbalétrier pour votre message qui apporte des détails fort intéressants et qui confirme la brutalité de SS de la Totenkopf durant cette campagne.

Disposez-vous de la confirmation qu'il relevait de la 32ème Cie du DI 131 ?


Quant à l'aspirant évoqué, il s'agit de toute évidence  (comme précisé dans mes précédents messages) de l'aspirant Durieux, grièvement blessé, abandonné à son sort par les SS et qui sera caché et soigné par des fermiers des environs.

Sur son évasion, est-il un de ceux qui a pu s'échapper de l'église de Tarare avec la complicité de certains habitants ? 

Eric

Bonjour,

  Malheureusement, je n'ai guère plus de détails, et je comprends combien ce récit est imprécis voire lacunaire ; je devais avoir dix-douze ans lorsque mon grand-père paternel s'est confié à moi, et il a dû adapter son témoignage à la jeunesse de mes oreilles. Par la suite, il n'en parlait plus guère semblant regretter d'avoir interrompu brutalement la vie d'hommes jeunes, fussent-ils des ennemis... Le seul nom que j'ai retenu est celui d'un autre soldat français _ Mosellan _ qui fut pris dans le simulacre d'exécution car, par coïncidence, il avait le même patronyme que celui de mon grand-père : Huber...  J'espérais moi-même en apprendre un peu plus sur cet épisode. Mon grand-père est décédé loin de chez lui, et ses effets, ses papiers, ses médailles ont été dispersés je ne sais où. Il s'est évadé plus tard d'un camp de prisonniers de guerre car, suite à un incident qu'il serait un peu long d'expliquer, il fut jeté au mitard et le cuisinier du camp, bavarois à la forte personnalité et au grade d'adjudant, s'en alla plaider sa cause auprès du commandant du camp ; il apprit que mon grand-père, comme tous les soldats qui avaient fait preuve de combativité, était inscrit sur une liste noire, et susceptible d'être fusillé pour l'exemple au moindre faux-pas. Cet adjudant conçut un plan d'évasion qui heureusement fonctionna ; mon grand-père après s'être défait d'un garde réussit à s'enfuir non s'en s'être blessé à un genou... Plus tard, on le vit apporter sa contribution à la libération de sa terre natale, notamment en gardant à son tour des prisonniers de guerre à Strasbourg (à l'exception d'une escarmouche un peu vive sur les bords du Rhin qui fit plus de bruit qu'autre chose et ne causa aucun dommage ni aux Français ni aux Allemands).

EDIT : peut-être un indice en faveur du dépôt d'infanterie cité plus haut : après son évasion mon grand-père regagna Saint-Etienne où il avait laissé son épouse enceinte de ma tante (née début décembre 1940) et mon père alors âgé de 4 ans ; il y vécurent dans le plus grand dénuement avant de s'installer à la frontière espagnole après un crochet dans le sud-ouest...

Cordialement

Bonjour,
 Mon grand père appartenait au Dépôt d'Infanterie 131 de Saint Etienne. Il a été fait prisonnier à Tarare le 19 juin 1940.Pourriez vous m'informer plus sur cette bataille. Merci