[Kangzhan] Ces étranges armes françaises vendues à la Chine

Bonjour à tous,
 
J’ai récemment acheté le live Kangzhan: Guide to Chinese Ground Forces 1937-1945 (2016)
https://www.helion.co.uk/kangzhan-guide-to-chinese-ground-forces-1937-45.html
 
Sans vous décrire en détail cet ouvrage, disons simplement qu’il couvre son sujet d’une façon exceptionnelle et que je ne peux qu’en recommander l’achat immédiat à tout passionné de la guerre Sino-japonaise de 1937-1945…
 
Dans ce livre, sont traités notamment les divers matériels importés par la Chine et parmi ceux-ci on y trouve de véritables pépites, dignes des meilleurs tiroirs de l’inconnu.
 
Et l’on y trouve de quoi intéresser tous les amateurs de matériel français des années 30, auxquels ce forum et ses publications (dont GBM) sont consacrés.
 
En fait, j’ai découvert pas moins de deux équipement français dont je n’avais jamais entendu parler avant de lire Kangzhan et je voudrais savoir si les grands spécialistes de ce forum peuvent m’en dire plus à ce sujet.
 
Le premier est une grenade à fusil, plus précisément la grenade à fusil Brandt modèle 1931. Cette grenade dotée d’un "piège à balle" pesant 450 gr pour une portée indiquée de 325 mètres ne semble avoir été acquise que par les Chinois (troupes du Yunnan) et sans doute en assez petit nombre…
 
Le second matériel est un petit mortier de 37mm , développé à la fin des année 30 par la société MAM (j’ignore ce que signifie cet acronyme). Il est qualifié de "mortier de guérilla" et utilisable par un seul homme en tirant un projectile de 500 grammes à 930 mètres…
 
Je n’avais jamais entendu parler de ces matériels, et comme ils sont français, j’aimerais savoir si les spécialistes de ce forum en savent davantage à leur sujet…
 
 
 
Un dernier matériel, pas tout à fait inconnu cette fois, est le canon Schneider extra-léger (SEL) de 75mm, présenté par Guy François dans le GBM n°113, page 18. Le livre nous apporte deux compléments d’information que je tiens à vous faire partager.
 
Tout d’abord, la Chine a acheté ce canon, c’est une info même si la quantité n’est pas indiquée (elle est sans doute modeste, quoi qu’il en soit). Ensuite, ce canon est décrit comme un canon hybride, pouvant monter, de façon interchangeable, un tube d’obusier de 75mm ou un tube antichar de 47mm (à l’instar d’un canon néerlandais Siderius également acheté par la Chine). Ce canon de 47mm aurait tiré un projectile de 1,5 kg à 600 m/s et est donné pour avoir pu perforer 30mm de blindage à 1000m, ce qui me semble très honorable comme performance.
 
Reste que je n’avais pas du tout entendu parler de cet aspect hybrique du canon Schneider extra-léger et je me demande si M. Guy François peut nous en dire plus à ce sujet : scoop ou bien confusion avec un autre matériel ? Pourrait-on ouvrir une enquête, s’il vous plait ?

Bonsoir,

La firme Schneider a bien livré à la Chine des canons extra-légers SEL de 75mm convertibles en 47 mm anti-chars mais j'ignore la quantité produite.
Un correspondant chinois m'a fait passer il y a plus d'un an le document joint qui confirme la nature du matériel. Ce correspondant a d'ailleurs acquis un exemplaire de GBM 113 pour en savoir un peu plus sur le canon de 75 mm SEL mas il ignorait lui-aussi la quantité produite pour son pays.
Ce document a-t-il un rapport avec le livre que vous avez cité et est-il publié dans cet ouvrage?

Cordialement,
Guy François.

Bonsoir,

Informations fort intéressantes...

La MAM pourrait bien être la Manufacture munitions Artillerie de Marseille. C'est en tous cas ce que ces trois lettres signifiaient lorsqu'elles étaient gravées sur des munitions.

ALVF a écrit:

Bonsoir,

La firme Schneider a bien livré à la Chine des canons extra-légers SEL de 75mm convertibles en 47 mm anti-chars mais j'ignore la quantité produite.
Un correspondant chinois m'a fait passer il y a plus d'un an le document joint qui confirme la nature du matériel. Ce correspondant a d'ailleurs acquis un exemplaire de GBM 113 pour en savoir un peu plus sur le canon de 75 mm SEL mas il ignorait lui-aussi la quantité produite pour son pays.
Ce document a-t-il un rapport avec le livre que vous avez cité et est-il publié dans cet ouvrage?
Cordialement,
Guy François.

Magnifique document, merci!! Puis-je le sauvegarder pour mes propres archives ?

Le cas du 47/75mm Schneider est traité pages 329 et 333 du livre:
https://books.google.fr/books?id=ZYQwDwAAQBAJ&pg=PA333&lpg=PA333&dq=47/75mm+Schneider+hybrid+gun&source=bl&ots=daIUeBRy0l&sig=u-2BrSfVMr48LgIMDzpxeUrY-O4&hl=fr&sa=X&ved=2ahUKEwjK4565wIbdAhVC6RoKHUG8C0sQ6AEwBXoECAkQAQ#v=onepage&q=47%2F75mm%20Schneider%20hybrid%20gun&f=false

Comme vous pouvez le voir, la photo est différente et ne montre qu'un 75mm.

Il est indiqué, page 329 toujours, que:
-12 exemplaires en 75mm et 12 exemplaires en 47mm on été commandés en 1932 et livrés en mai 1933. Chaque pièce est donc livrée en calibre unique...
-En juillet 1935, 12 exemplaires supplémentaires (avec un canon de chaque calibre), formant une section, ont été commandés et livrés pour moitié en juin 1935 et le reste en mars 1937.
-En avril 1936, 14 sections (ce qui ferait 168 pièces si on reste à une section de 12 canons... !?) ont été commandées, encore une fois avec un canon de chaque calibre par pièce. Elles ont été livrées en août 1937.

Ceci ferait un total de 204 pièces livrées... cela vous semble-t-il crédible ?

Concernant les munitions, elles se répartissent ainsi:

1ère commande: 4000 obus de 75mm HE et 2000 obus de 47mm HE
2ème commande: 3600 obus de chaque calibre en HE
3ème commande: 14000 obus de 75mm HE, 9800 obus de 47mm HE et 4200 obus de 47mm AP

Soit 41200 obus pour 204 pièces, soit un peu plus de 200 coups par arme...

Eric Denis a écrit:

Bonsoir,

Informations fort intéressantes...

La MAM pourrait bien être la Manufacture munitions Artillerie de Marseille. C'est en tous cas ce que ces trois lettres signifiaient lorsqu'elles étaient gravées sur des munitions.

Le mortier en question est visible ici:
https://books.google.fr/books?id=ZYQwDwAAQBAJ&pg=PA340&lpg=PA340&dq=kangzhan+37mm+mam+guerilla+mortar&source=bl&ots=daIUeBSB-t&sig=vJsVRmFfgumNOV3xX-CcxvEba1A&hl=fr&sa=X&ved=2ahUKEwi8576kxYbdAhVI3RoKHbH_AzoQ6AEwAHoECAEQAQ#v=onepage&q=kangzhan%2037mm%20mam%20guerilla%20mortar&f=false

Correction, je viens de trouver la réponse page 337:
MAM semble signifier: "Matériel et armements Modernes", développé par les Ateliers et chantiers de la Loire...

200 mortiers et 20000 obus commandés. Livrées en Birmanie entre septembre et octobre 1938 mais seuls 500 obus semblent être arrivés à destination en mars 1939... La production des obus semble avoir été sous-traitée à Brandt.

Bonjour,

Concernant les canons Schneider SEL, vous avez mal interprété le texte, les 12 sections commandées en 1935 et 1936 sont des sections à 2 pièces ("...july 1935 12 two-gun sections..."), donc il y a 24 + 24 + 28 pièces SEL commandées à Schneider, soit 76 pièces en tout ce qui semble plus réaliste.
A noter que les dernières livraisons interviennent en mars 1937 donc juste à l'époque où les établissements d'artillerie de la Société Schneider du Creusot et du Havre sont nationalisés dans le cadre d'une "grande avancée pour la Paix" sur initiative du gouvernement Blum dans sa lutte contre les "marchands de canons".
Une question complémentaire: pourquoi de 1937 à 1940, les ex-établissements Schneider ont livré si peu de matériels modernes à l'Armée française?
Cordialement,
Guy François.

Ah au temps pour moi. Et pourtant je me flatte d'avoir un bon niveau en anglais... comme quoi, "sans cesse sur le métier...etc".

Merci pour ce correctif. J'ignorais l'histoire de cette nationalisation, mais pourquoi ne suis-je pas surpris ?

Une petite requête si vous le permettez: envisagez-vous de nous présenter la version 47mm de ce canon dans un futur GBM ? Cela m'intéresserait au plus haut point...

Cordialement.

Ces tubes de 47 Schneider étaient-ils chambrés pour la munition de 47 marine ? car il y a une anecdote savoureuse pour ceux qui équipaient la Ligne Maginot. On avait fait croire aux gens dans les ouvrages que vu le nombre restreint de coups d'obus perforants disponibles, ils étaient stockés en parc et devaient être acheminés très rapidement sur la zone menacée... (nombreuses notes de service à l'appui...) Après la reddition  les responsables des blocs apprirent que les notes étaient du bluff... il n'y avait aucun stock, si petit fut-il, les perforants n'avaient jamais été livrés...

Bonsoir,

Il y a assurément matière à rédiger un article documenté relatif aux "canons d'infanterie" et au programme des canons "extra-légers" car à partir de 1918, la question de la lutte anti-chars est partie intégrante des spécifications des "canons d'infanterie".
Malheureusement, si le programme des canons "extra-légers" est bien documenté en ce qui concerne les matériels étudiés et construits à l'état de prototypes par les établissements de l’État, il n'en est pas de même pour les matériels Saint-Chamond (de 1919 à 1925) et Schneider (de 1919 à 1937). On peut toujours espérer que des archives de ces firmes réapparaissent dans les dépôts d'archives où ils existent peut-être encore. Je reste prudent car il est bien connu que les dirigeants des sociétés héritières de Schneider ont tout fait pour "gommer" le passé de "marchand de canons" de la firme.
On trouve ainsi bon nombre de photographies de matériels des années 1920-1930 difficilement identifiables faute de documentation fiable.
Cordialement,
Guy François.