Les leçons de l'instructeur d'infanterie - 1940

Bonjour,



Encore un ouvrage des éditons Lavauzelle mais très différent de la collection que nous connaissons tous. Celui-ci, comme son nom l'indique, est le manuel de l'instructeur d'infanterie, un peu comme l'ouvrage du maitre face à ses élèves, dans sa version de 1940.

Tout l'intérêt consiste à voir concrètement l'ensemble des connaissances transmises à nos soldats en formation et comment ces connaissances étaient transmises. Sa lecture est fort instructive et peut expliquer bien des choses.

A titre d'exemple, je vous propose l'introduction du chapitre concernant la défense antichar, avec ce passage, réservé à la lecture seule de l'instructeur :

"AUX INSTRUCTEURS.
L'infanterie française n'a pour ainsi dire pas connu, durant la guerre de 1914 à 1918, l'épreuve de l'attaque par les chars de combat, épreuve qui ne fut pas ménagée, alors, à l'infanterie allemande.

Aussi cette dernière a-t-elle rapporté de la guerre précédente, en même temps que de cuisantes leçons, des données certaines d'expérience, pour faire face aux attaques par chars de combat. Il n'en est pas de même pour nous, et cette épreuve reste encore pour notre infanterie, même munie d'un armement antichar efficace, une redoutable nouveauté.

Or le fantassin de première ligne, en dépit de ce matériel antichar, est à peu près désarmé devant le mastodonte cuirassé, et doit s'en remettre, à des armes lointaines, du soin d'assurer sa propre sécurité, situation singulièrement dangereuse pour le moral.

A cet état de choses, apparemment sans remède pour le moment, il n'est cependant, d'autre palliatif que l'action : il ne faut pas que le fantassin subisse le char comme le gibier subit le chasseur.

Aussi doit-on créer chez le fantassin une mentalité analogue à celle de ces peuplades, armées de poignards et d'épieux primitifs, qui ne craignent pas de s'attaquer à des fauves presque invulnérables, et qui terrassent ces derniers, à force d'ingéniosité de ruse, de souplesse et de courage.

Préparons donc notre fantassin du premier rang, le fantassin armé seulement de son fusil et de ses grenades, d'engins incendiaires et fumigènes, à engager un duel efficace contre le mastodonte moderne, dont la carapace paraît cependant défier le projectile. .

D'où la nécessité d'un exercice complémentaire spécial à la défense contre chars."

Bonne lecture.

Bonjour Eric,

Merci pour ces informations qui montrent bien que l'après Première Guerre mondiale n'a pas vu publier que des textes tenant compte des leçons apprises chèrement pendant ce long conflit (lessons learning).

Dans le même genre de constatation, je suis en train de lire "Cavaliers de France" du R.P. Albert Bessière, préfacé par le général Cherfils. Sortie chez Perrin en 1920, cette troisième édition traite de la Cavalerie dans les "batailles de Noyon, de la deuxième Marne, de Champagne et dans la poursuite et l'occupation".

Le tout début de la préface du général Cherfils indique immédiatement au lecteur que beaucoup de choses (tactique et religion par exemple) vont être mélangées :

"La guerre 1914-1918, dont l'incendie s'éteint à peine dans un ciel encore flamboyant de ses lueurs, est une leçon de choses prodigieuse ! Elle met en opposition les deux conceptions opposées, en quoi se résume le génie de deux races irréconciliables. D'un côté la victoire basée sur la terreur; de l'autrele triomphe espéré de la force morale: la puissance matérielle et la grandeur de l'âme; les moyens infernaux et les inspirations célestes: Lucifer et le Christ."

Cordialement,

Thierry Moné