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| Une résistance à la russe en France ? | |
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Auteur | Message |
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Invité Invité
| Sujet: variante espagnole Mar 18 Aoû 2020 - 16:09 | |
| Je reprends ici le débat avec Loïc M, sur l'inconnue espagnole : Loïc M. - Bruno Roy-Henry a écrit:
- Je me pose donc la question : à quelle date la lettre de Franco a-t-elle été rédigée ? Si elle est antérieure au 16 juin et comporte une offre ferme d'alliance, assortie de la main-mise sur le Maroc et l'Oranie, c'est une pierre, en effet, dans le soulier des uchronistes...
Une offre d'alliance certes, mais concernant des opérations sur un théâtre qui non seulement est hors de portée de l'Allemagne, mais qui serait difficile à ravitailler pour les Espagnols. Alors évidemment, si la France persiste dans son refus de la défaite, Hitler ne pourrait être qu'intéressé que des Espagnols se fassent trouver la peau pour lui, mais c'est un calcul à court terme qui ne me semble pas dans les habitudes du personnage.Comme je l'ai déjà écrit, je serais heureux de lire un récit de telle nature, qui nécessitera une sacrée dose d'imagination !Si la France continue le combat et que son gouvernement se replie en AFN, je vois mal Hitler repousser les offres espagnoles. Ce qui veut dire 100 000 espagnols prêts à attaquer au sud du Rif. Qu'est-ce que Noguès a sous la main pour leur faire face ? A terme, les Allemands ne peuvent manquer de les renforcer d'une manière ou d'une autre... Jusque-là, j'étais plutôt convaincu par la FTL, mais j'ai maintenant l'impression d'avoir sous-estimé la menace franquiste... |
| | | Loïc M. Commandant
Nombre de messages : 619 Date d'inscription : 12/01/2009
| Sujet: Re: Une résistance à la russe en France ? Mar 18 Aoû 2020 - 19:37 | |
| Je ne dis pas que la menace franquiste sur le moment est faible, mais qu'une guerre (de conquête qui plus est) sur gagne sur le long terme. Or, l'Espagne a un besoin vital du pétrole américain, cf. ce bon article sur les différentes phases d'embargo : - Citation :
- With the fall of France in June 1940, the British asked the United States to halt its considerable oil exports to Spain, and the Americans complied.
Spain panicked, the researchers report, fearful for its transportation systems, fishing fleets, and industries. The country had no other access to oil, and appeals to Germany, which was concerned about fuelling its war machine and industries, were of no avail. Franco was forced to seek accommodation with the Allies, and in return for an allotment of oil that amounted to about 80 percent of Spain's consumption before the Spanish Civil War, Franco acceded to the Allied demands for neutrality. On y lit également que la GB achète du minerai de fer et de la potasse espagnole. Donc, Franco peut certes lancer ses troupes à l'attaque, mais combien de temps avant que son pays ne soit asphyxié économiquement ? Sans parler du fait que le ravitaillement des troupes au travers du détroit va être très délicat et que son aviation ne tiendra pas très longtemps. Plus le risque qu'une insurrection dormante ne se relance dans certaines régions du pays. Le soutien allemand va prendre du temps pour se concrétiser (par comparaison avec le temps qu'il a fallu à la LW pour se redéployer dans le nord de la France en juillet et août 1940), en faisant plus ou moins l'impasse sur la bataille d'Angleterre. |
| | | dhouliez Admin
Nombre de messages : 9112 Date d'inscription : 21/11/2006
| Sujet: Re: Une résistance à la russe en France ? Mar 18 Aoû 2020 - 19:54 | |
| Bonsoir à tous, - Loïc M. a écrit:
- @dhouliez : pour le 18e CA, sa mission est en effet le colmatage de la brèche, mais cela permet aussi un repli en meilleur ordre du GA2, qui ne risquerait pas (sur le papier) de voir ses lignes de repli menacées.
Cela aurait permis... Mais dans la mesure où la mission du 18e CA est de boucher une brèche, le voir en place plus tôt et à une place différente de ce qui lui était demandé, avant que la brèche apparaisse ne relève pas seulement d'un éventuel retard de décision. Mes précisions étaient là pour corriger des erreurs factuelles. - Citation :
- Vous avez un autre point de vue ? Pas de souci : lancez-vous dans l'écriture.
Ce n'est pas le première fois que vous écrivez cela. Est-ce à dire que si l'on n'est pas prêt à écrire une uchronie, on ne peut pas se permettre de discuter votre analyse de la position de l'Espagne ? Encore une fois, vous évaluez la position de l'Espagne a posteriori, alors que l'on vous montre qu'en juin 40, son attitude était beaucoup moins claire que ce que vous suggérez. DH |
| | | dhouliez Admin
Nombre de messages : 9112 Date d'inscription : 21/11/2006
| Sujet: Re: Une résistance à la russe en France ? Mar 18 Aoû 2020 - 20:09 | |
| - Loïc M. a écrit:
- La bataille d'Angleterre qui est censée faire jeter l'éponge aux Britanniques (objectif prioritaire du Reich à l'été 40) sera retardée ou de moindre ampleur. Et au final il y a le risque de retarder l'attaque de l'URSS qui est l'objectif d'Hitler depuis longtemps.
Objectif prioritaire du Reich parce que la France a signé l'armistice. Attaque rapide de l'URSS parce que Hitler estime que c'est l'espoir d'un renfort de l'URSS qui pousse Churchill et le Royaume-Uni à rester en guerre. |
| | | Loïc M. Commandant
Nombre de messages : 619 Date d'inscription : 12/01/2009
| Sujet: Re: Une résistance à la russe en France ? Mar 18 Aoû 2020 - 21:06 | |
| - dhouliez a écrit:
- Mais dans la mesure où la mission du 18e CA est de boucher une brèche, le voir en place plus tôt et à une place différente de ce qui lui était demandé [...]
Ce point est lié à la divergence avec l'histoire réelle. Votre remarque concernant son placement historique est exacte. - dhouliez a écrit:
-
- Citation :
- Vous avez un autre point de vue ? Pas de souci : lancez-vous dans l'écriture.
Ce n'est pas le première fois que vous écrivez cela. Est-ce à dire que si l'on n'est pas prêt à écrire une uchronie, on ne peut pas se permettre de discuter votre analyse de la position de l'Espagne ? Oh non, pas du tout, c'est une très bonne chose de discuter et confronter les points de vue. Mais du moment que l'on estime que l'Espagne pourrait se lancer dans la guerre alors que la France reste en course (alors que Madrid ne l'a pas fait alors que la France était dans la pire des situations), alors autant aller jusqu'au bout et essayer de bâtir un scénario qui tienne la route ! Sinon, je trouve que l'on reste un peu sur sa faim et surtout on s'évite une étude complète pour voir si l'histoire tient la route, justement. - dhouliez a écrit:
- Encore une fois, vous évaluez la position de l'Espagne a posteriori, alors que l'on vous montre qu'en juin 40, son attitude était beaucoup moins claire que ce que vous suggérez.
Que Franco soit devenu un expert dans les situations ambigües ne fait absolument aucun doute à mes yeux et c'est ce qui explique la longévité de son règne. Refourguer en douce du pétrole allié aux Allemands (au point que les USA ont exigé l'envoi d'inspecteurs sur place), vendre du tungstène aux Alliés et aux Allemands, interner avions allemands et alliés se retrouvant en Espagne (mais uniquement les aviateurs alliés), les exemples ne manquent pas ... Jusqu'à l'envoi de la division Azul sur le front de l'est qui lui a permis de se débarrasser des éléments encore plus extrémistes que lui. Son pouvoir en 1940 est encore fragile, va-t-il le risquer sur un coup de tête alors que la France, contre toute attente, s'obstine, a encore de beaux restes et est soutenue par un allié puissant et par l'industrie de l'Oncle Sam (dont par ailleurs l'Espagne a besoin) ? Ou alors Franco s'illusionne-t-il de la puissance allemande et n'a pas pleinement consciente des difficultés logistiques (et des pertes) allemandes à la fin de la campagne de France et s'imagine-t-il que son allié pourrait être à pied d'oeuvre dans le sud de l'Espagne voir en Afrique du Nord en quelques semaines ? Pour en revenir à ce que vous suggérez : la décision de Reynaud de jeter l'éponge et celle de Pétain de demander l'armistice sont-elles, d'après vous, directement liées à cette connaissance qu'auraient les Français de troupes espagnoles prêtes à se jeter sur l'Afrique du Nord et contre lesquelles nous aurions été impuissants (avec pourtant les Anglais à nos côtés avec lesquelles la coopération tenait encore, en témoigne l'opération BQ lancée le 22 juin d'Alexandrie) ? - dhouliez a écrit:
- Loïc M. a écrit:
- La bataille d'Angleterre qui est censée faire jeter l'éponge aux Britanniques (objectif prioritaire du Reich à l'été 40) sera retardée ou de moindre ampleur. Et au final il y a le risque de retarder l'attaque de l'URSS qui est l'objectif d'Hitler depuis longtemps.
Objectif prioritaire du Reich parce que la France a signé l'armistice. Attaque rapide de l'URSS parce que Hitler estime que c'est l'espoir d'un renfort de l'URSS qui pousse Churchill et le Royaume-Uni à rester en guerre. Oui pour le second point, mais non pour le premier : la volonté d'Hitler d'annihiler la menace de l'est et de s'étendre dans cette direction est connue depuis longtemps. L'armistice lui offre l'opportunité d'engager la planification active de l'opération. Mais pour autant, le haut commandement allemand sait qu'il n'a pas les moyens d'aller chercher les Français en Afrique du Nord, tout en espérant forcer les Anglais à jeter l'éponge et conserver une chance d'abattre l'URSS avant que cette dernière ne soit trop forte. Par ailleurs, la tension entre Berlin et Moscou à propos des Balkans ne fait que croître. Une France qui s'obstinerait après avoir perdu sa capitale, une grande partie de son armée et de ses ressources, son prestige, et de plus, serait réduite à sa population "coloniale" méprisée, pourrait être perçue comme vaincue. En tout cas, matée au point de ne plus représenter une menace avant un bon moment, laissant le temps à l'Allemagne de se retourner vers l'Est, en finir avec l'URSS puis revenir vers l'ouest avant l'arrivée des Américains. Exactement ce qu'Hitler a pensé de la Grande-Bretagne. |
| | | dhouliez Admin
Nombre de messages : 9112 Date d'inscription : 21/11/2006
| Sujet: Re: Une résistance à la russe en France ? Mar 18 Aoû 2020 - 22:22 | |
| Sur le 18e CA : Vous avez présenté la mission et l'action du 18e CA de façon erronée, j'ai corrigé. Je ne comprends pas ce que vient faire "Ce point est lié à la divergence avec l'histoire réelle." - Citation :
- Mais du moment que l'on estime que l'Espagne pourrait se lancer dans la guerre alors que la France reste en course (alors que Madrid ne l'a pas fait alors que la France était dans la pire des situations), alors autant aller jusqu'au bout et essayer de bâtir un scénario qui tienne la route ! Sinon, je trouve que l'on reste un peu sur sa faim et surtout on s'évite une étude complète pour voir si l'histoire tient la route, justement.
1° L'armistice signé, l'Espagne n'a plus rien à gagner sauf Gibraltar, l'armistice non signé elle peut gagner le Maroc et l'Oranie. Ca c'est l'analyse en juin 40. 2° Ce que l'Espagne aurait pu faire si... ne m'intéresse pas dans ce débat (je comprends que ça vous intéresse, mais j'aimerais que vous compreniez que ce n'est pas de ça que je parle, étant donné que je vous le répète régulièrement). Ce qui m'intéresse est l'analyse que pouvaient avoir les dirigeants en juin 40 avec les renseignements de juin 40, 3° Je n'ai donc besoin d'écrire aucune uchronie pour vous dire que l'analyse qui était faisable en juin 40 n'était pas aussi limpide que ce que vous prétendez. (Quoi qu'en définitive on ne sait jamais vraiment si vous vous positionnez dans l'uchronie ou dans la réalité) 4° L'histoire tient nécessairement la route, puisque je m'intéresse à l'histoire réelle et non à une uchronie. - Citation :
- Pour en revenir à ce que vous suggérez : la décision de Reynaud de jeter l'éponge et celle de Pétain de demander l'armistice sont-elles, d'après vous, directement liées à cette connaissance qu'auraient les Français de troupes espagnoles prêtes à se jeter sur l'Afrique du Nord et contre lesquelles nous aurions été impuissants (avec pourtant les Anglais à nos côtés avec lesquelles la coopération tenait encore, en témoigne l'opération BQ lancée le 22 juin d'Alexandrie) ?
Je n'ai jamais suggéré cela, et il est particulièrement désagréable de voir à nouveau mes propos ainsi déformés. La décision de Reynaud n'est pas celle de Pétain, ses motivations ne sont pas nécessairement les mêmes. Néanmoins, il est confronté à la même situation que Pétain, et la situation est la même pour tous, car ils vivent dans le même monde : - la Grande-Bretagne ne paraît pas fiable, et Reynaud est bien en peine de démontrer l'inverse, et ce n'est pas BQ qui change la donne ; - les USA ne sont pas prêts à fournir l'aide concrète que Reynaud leur demande - il n'y a aucune garantie qu'ils ne redeviennent pas très isolationnistes après leurs élections ; - l'URSS est alliée de l'Allemagne (traité de délimitation et d'amitié) et rend inefficace le blocus ; - l'Espagne est de plus en plus hostile La position de l'Espagne est un facteur entre d'autres. Le principal facteur, à mon avis, qui détermine la position de Pétain est celle que j'ai déjà cité : l'idée qu'il est inenvisageable d'abandonner les populations de la France continentale. Pour les deux points, je ne suis pas convaincu que vous ayez lu correctement ce que j'ai écrit : "Objectif prioritaire du Reich parce que la France a signé l'armistice" se rapporte bien évidemment à votre "objectif prioritaire du Reich à l'été 40" donc à la bataille d'Angleterre. - Citation :
- Mais pour autant, le haut commandement allemand sait qu'il n'a pas les moyens d'aller chercher les Français
Ce dont je parle n'est pas ce que le haut-commandement a dit avoir su... Pour le reste, comme vous utilisez avec raison le conditionnel, ça ne me pose aucun problème. |
| | | Romogolus Capitaine
Nombre de messages : 596 Localisation : Le duché au deux léopards Date d'inscription : 24/10/2015
| Sujet: Re: Une résistance à la russe en France ? Mer 19 Aoû 2020 - 14:53 | |
| Bonjour à tous,
On est complètement sorti du débat initial mais la discussion est intéressante. Toutefois, j'ai l'impression qu'on se focalise beaucoup sur France-Allemagne, écartant le Royaume-Unis et l'Italie...
Or si on considère que la résistance française ne pouvait se faire que depuis l'Empire, il faut bien prendre en compte la situation complète : en Afrique, les positions italiennes sont plus ou moins cernées par celles des alliées. Même si ces derniers ne sont pas forcément en mesure de lancer et soutenir une vaste offensive à l'été 1940, ça me parait être une belle épée de Damoclès sur la tête du Duce. Dans ce cas, une entrée en guerre de l'Espagne n'aurait-elle pas été ardemment souhaitée et encouragée par le dirigeant italien ? Pour les Allemands, cela n'aurait-il pas été un moyen de "maintenir la pression" sur la France pendant que la Wehrmacht se remettait de la conquête de la métropole ?
Bref ne faut-il pas envisager, en plus d'éventuelles conquêtes territoriales, une pression de l'Allemagne et l'Italie, pays à qui, il me semble, Franco devait sa place et qui auraient très bien pu lui demander un petit "renvoi d'ascenseur".
Cordi@lement |
| | | dhouliez Admin
Nombre de messages : 9112 Date d'inscription : 21/11/2006
| Sujet: Re: Une résistance à la russe en France ? Mer 19 Aoû 2020 - 15:10 | |
| Bonjour,
Dans l'analyse que les dirigeants pouvaient faire en juin 40, il me semble qu'une conjonction d'intérêts entre l'Italie et l'Espagne - se partager la Méditerranée - est beaucoup plus logique que Mussolini voyant d'un mauvais œil que Franco le débarrasse de Gibraltar, s'octroie le Maroc et l'Oranais, et lui laisse la Tunisie, le Constantinois, voire l'Algérois...
Cordialement, DH |
| | | Louis Martel Commandant
Nombre de messages : 611 Localisation : Sud-ouest Date d'inscription : 13/06/2009
| Sujet: Re: Une résistance à la russe en France ? Jeu 20 Aoû 2020 - 17:26 | |
| Bonjour
Bruno Roy-Henry a écrit: "Ce calendrier est imprécis : ..." Il n'est pas imprécis mais incomplet, je n'ai pas cité tous les faits mais seulement ceux qui montrent que la proposition du 19 juin d'entrée en guerre est l'aboutissement d'un processus. Le contexte a aussi joué car il y a une part d'opportunisme mais cette opportunité peut-être saisie car les moyens de la saisir ont été mis en place. C'est ce que je veux montrer en mettant ces faits en avant. Le document du 19 juin a été publié dans "Documentos inéditos para la historia del Generalisimo Franco"
"Je me pose donc la question : à quelle date la lettre de Franco a-t-elle été rédigée ? Si elle est antérieure au 16 juin et comporte une offre ferme d'alliance, assortie de la main-mise sur le Maroc et l'Oranie, c'est une pierre, en effet, dans le soulier des uchronistes..." Les revendications officialisées dans le document du 19 juin, sont les mêmes que celles présentés quelques jours plus tôt. Ce n'est donc pas la demande d'armistice qui les faits émerger.
Loïc M. a écrit: " ... , pensez-vous vraiment que Franco aurait pris le risque d'engager son pays pas encore remis d'une très sale guerre dans un nouveau conflit, ..." "Vous avez un autre point de vue ? Pas de souci : ..." "...c'est une très bonne chose de discuter et confronter les points de vue" Je n'ai pas à penser ceci ou cela : le 19 juin Franco propose à Hitler l'entrée en guerre de l'Espagne en échange de l'acceptation ses revendications territoriales. C'est un fait, quelque chose dont la véracité est démontrée et il n'est pas soumis à mon opinion, à une confrontation des opinions de chacun ou à un choix. Vous avez posez des questions, les faits vous apportent les réponses. En histoire ça fonctionne comme-ça.
Loïc M. a écrit: « Vous imaginez-vous que les gesticulations espagnoles nous sont inconnues ? » Quelles gesticulations? Les revendications ont été présenté à Hitler. Les "gesticulations" espagnoles au Maroc étaient donc destinées à l'impressionner et le pousser à céder? Si les "gesticulations" espagnoles étaient destinées à impressionner la gouvernement français et le pousser à céder, c'est a lui que les revendications aurait du être présenter. Là vous cherchez à tordre le sens. Franco veut se saisir des territoires qu'il revendique. Sa proposition d'entrer en guerre prouve qu'il est prêt à le faire par la force. Demander à Hitler et à Mussolini d'accepter ces revendications c'est demander la garantie qu'ils ne réclamerons rien ultérieurement. Ensuite il n'y a que deux alternatives : Franco réussit ou il échoue. Comme dans le cas italien, l'échec entraîne une implication allemande. Mais dans les deux cas l'AFN est condamnée.
Loïc M. a écrit: "Je ne pense pas écrire une énormité en disant qu'Hitler ne s'intéresse pas à la Méditerranée." Justement si. Hitler s'intéresse à la Méditerranée et il en comprends les données stratégiques. Lisez ses directives 15 à 23, leur contenus le prouve. Cet intérêt est secondaire par rapport à celui qu'il a pour l'Est, mais il est réel. De plus je vous rappelle que l'Espagne et le détroit de Gibraltar appartiennent autant à la sphère stratégique atlantique qu'à celle de méditerranée. Pour le Maroc c'est 90% et 10%.
Loïc M. a écrit: "Nous avons fait le choix d'un Franco attentiste, tout comme il l'a démontré tout au long de sa longue carrière, ce qui lui a d'ailleurs pas mal réussi au final." "Que Franco soit devenu un expert dans les situations ambigues ne fait absolument aucun doute à mes yeux et c'est ce qui explique la longévité de son règne." Or les faits montrent qu'au printemps 1940, l'Espagne se prépare pour saisir les opportunités créées par l'offensive allemande à l'Ouest. Attentisme et opportunisme ne sont pas incompatibles. De plus, nous pouvons nous poser la question de la part du refus d'Hitler d'accepter les revendications espagnoles dans l'attitude dilatoire et attentiste de Franco face aux demandes postérieures allemandes.
Les raisons que vous donnez sur l'incapacité espagnole à participer à un conflit long sont réelles. Mais, si vous aviez lu Michel Catala vous sauriez que l'attitude espagnole oscille entre ses raisons et la volonté de rendre à l'Espagne un rang de puissance. Le contexte événementiel fait pencher dans un sens ou dans l'autre l'attitude de Franco. En 1940 le contexte est celui d'un fin de guerre plutôt que d'une guerre mondiale à venir. L'URSS n'est en guerre qu'une année plus tard, les USA, une année et demi. Dans les deux cas, l'entrée en guerre se fait en raison d'une agression par un pays de l'Axe.
Enfin, les Espagnols n'ont pas besoin de conquérir tout le Maroc pour s'en saisir. Il leur suffit de conquérir la façade portuaire, soit une offensive de 150 à 200 km, pour rendre l'ensemble du Maroc indéfendable en raison de la rupture des lignes de communications.
Loïc M. a écrit: "Pour en revenir à ce que vous suggérez : la décision de Reynaud de jeter l'éponge et celle de Pétain de demander l'armistice sont-elles, d'après vous, directement liées à cette connaissance qu'auraient les Français de troupes espagnoles prêtes à se jeter sur l'Afrique du Nord et contre lesquelles nous aurions été impuissants" La menace espagnole est une raison pour justifier l'acceptation de l'armistice, pas pour justifier la demande. Par exemple, chez Noguès, c'est la principale raison. Une preuve en négatif ce rôle se trouve dans le fait que tous ceux, historiens ou non, ayant soutenu l'idée de la possibilité de continuer les combats en AFN ont nié l'existence d'une menace espagnole. Nous pouvons en déduire qu'accepter l'idée d'une menace espagnole est reconnaître qu'une tentative de prolongement des combats en AFN aurait conduit à accentuer la catastrophe et non à la limiter.
Cordialement |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Une résistance à la russe en France ? Jeu 20 Aoû 2020 - 18:43 | |
| Je dois dire que je suis ébranlé... Il est certain que si nous avons la certitude que Franco comptait passer à l'action, avec l'accord d'Hitler, il devenait impossible d'envisager sérieusement la défense de l'AFN. Surtout par le fait qu'il y avait déjà 100 000 espagnols dans le Rif, prêts à franchir la frontière ! |
| | | Loïc M. Commandant
Nombre de messages : 619 Date d'inscription : 12/01/2009
| Sujet: Re: Une résistance à la russe en France ? Jeu 20 Aoû 2020 - 19:15 | |
| Bonjour, Il faudrait décidément séparer ces réflexions sur la situation méditerranéenne et africaine, il y a sans doute beaucoup d'enseignements à en tirer. En particulier (et pour répondre à Romogolus), il serait intéressant d'avoir un état des relations directes ou indirectes entre Rome et Madrid. L'hypothèse d'une conjonctions d'intérêts entre les deux pays ayant quelque chance de se concrétiser me semble plus qu'hypothétique. Hitler n'aurait certainement pas manqué d'essayer de l'exploiter au printemps 1941, si cela lui avait permis de s'économiser l'envoi de l'Afrika Korps pour sauver la mise aux Italiens et/ou pour en finir avec les Anglais avant de se lancer vers l'est (l'hypothèse d'une perte de Gibraltar et/ou Malte aurait-elle été le facteur déclenchant d'un abandon de Londres ?). @Louis Martel : - Citation :
- Je n'ai pas à penser ceci ou cela : le 19 juin Franco propose à Hitler l'entrée en guerre de l'Espagne en échange de l'acceptation ses revendications territoriales. C'est un fait [...]
Oui, oui, c'est un fait. Mais quid de l'ampleur de les revendications de Franco ? N'est-il pas permis de penser que ces revendications étaient volontairement démesurées pour 1) soit entraîner un refus allemand, mais avec l'avantage de tout de même s'être positionné dans le "bon" camp 2) soit bénéficier de l'aide allemande, seule à même d'arriver à concrétiser ces exigences ? - Citation :
- Sa proposition d'entrer en guerre prouve qu'il est prêt à le faire par la force.
Je reprends votre calendrier : - Citation :
- Nuit du 17 au 18 juin : déployement des forces espagnoles en direction de la frontière interzonale (lettre de Dumarcay à Noguès du 19 juin, AMAE-M)
19 juin Présentation à Ribbentrop de la lettre de Franco proposant l'entrée en guerre de L'Espagne en échange de la satisfaction des revendications présentées le 17 juin. Refus d'Hitler. 20 juin et jours suivants : Repli des troupes espagnoles postées sur la limite inter-zonale marocaine. [...] Donc, en situation historique est : le 19 juin, Hitler à le choix entre accorder un armistice aux français ou d'accepter l'entrée en guerre de l'Espagne. Hitler choisit l'armistice. Les négociations d'armistice commencent le 21. Le 19, Hitler donne donc la priorité à la négociation, sans connaître l'avance le résultat de celle-ci, une nuance importante. Avant même l'acceptation formelle de la délégation française (qui a des ordres précis sur ce qu'elle peut accepter ou pas), Hitler rejette les demandes de Franco. Et Franco n'insiste pas. Franco veut avant tout préserver son pouvoir, poursuivre le redressement (laborieux) de son pays, se positionner dans le camp des vainqueurs et "voir venir" en espérant en tirer profit. Alors oui, je maintiens que les Espagnols ont fait monter les enchères (d'où le terme "gesticulations", qui vise aussi bien Berlin que les Français) selon le calendrier que vous indiquez. PS : J'ai lu Michel Catala. Je maintiens qu'Hitler ne s'intéresse pas à l'Afrique du Nord. Il a beau émettre des directives, aucun plan concret d'invasion de l'Afrique du Nord n'est écrit, même lorsque des rumeurs de sécession de Weygand arrivent à ses oreilles. Seule la conquête de la partie sud de la France métropolitaine est planifiée. Même lorsque des moyens conséquents existent pour prendre Malte et Gibraltar, contre des Anglais qui sont alors pratiquement seuls, rien n'est fait. Encore moins lorsque l'Afrka Korps se retrouve en difficultés alors que Rommel supplie pour en finir avec cette épine dans son flanc. Je rappelle une lecture utile pour ceux qui estiment que la conquête de l'AfN aurait été une formalité : "La France pouvait continuer la guerre en Afrique du Nord" (Albert Merglen, 1992, revue "Guerres mondiales et conflits contemporains"), qui s'appuie sur une bibliographie essentiellement allemande. Ce texte cite aussi "L'abîme: 1939-1945" (Jean-Baptiste Duroselle, 1982) qui mentionne un point important : le 15 juillet, la commission d'armistice allemande exige la cession de bases, ports, navires, etc pour la poursuite de la lutte contre l'Angleterre. Hitler reçoit le refus le 19. Et ensuite ? Ben, rien. - Citation :
- Une preuve en négatif ce rôle se trouve dans le fait que tous ceux, historiens ou non, ayant soutenu l'idée de la possibilité de continuer les combats en AFN ont nié l'existence d'une menace espagnole. Nous pouvons en déduire qu'accepter l'idée d'une menace espagnole est reconnaître qu'une tentative de prolongement des combats en AFN aurait conduit à accentuer la catastrophe et non à la limiter.
Que les menaces (ou gesticulations) espagnoles ne soient pas mises en avant (pourquoi niées ?) par de nombreuses personnes, c'est sans doute vrai. Mais finalement, le fait que l'Espagne soit très très largement restée en dehors du conflit, ne rejoignant même pas les Nations Unies au tout dernier moment à l'image de la Turquie, pourtant un autre partenaire assez proche de l'Allemagne qu'on aurait très bien pu voir basculer dans une alliance active avec Berlin, ne valide-t-il pas ce point de vue ? Une poursuite de la lutte côté français, avec une flotte et une aviation encore fortes (sans compter l'aide britannique), n'auraient-elles pas largement contre-balancé d'éventuelles conquêtes territoriales espagnoles qui au final n'auraient pas pu être conservées ? @dhouliez : je ne déforme pas vos propos, en tout cas pas intentionnellement. Il n'est pas anormal qu'une discussion permettre des digressions, des réflexions annexes, si ? "Ce que l'Espagne aurait pu faire si" ne vous semble peut-être pas important, mais me semble au contraire fondamental si on envisage que la France continue le combat (et pas qu'à moi, visiblement, vu la réponse de L. Martel). Pour les USA, je vous ai déjà donné mon point de vue : leur aide (payante ou pas ...) n'est pas si faible que cela et en juin 40 rien ne permet de dire dans quel sens elle va évoluer. Citons en vrac : les contrats d'armement, la fourniture de matériels en urgence, l'évacuation de l'or, l'embargo sur le pétrole à destination de l'Espagne à la demande de la GB suite à l'armistice (et probablement au coup de main de Tanger et aux revendications sur les territoires français), ... @BRH dont je viens de voir la réponse : - Citation :
- Je dois dire que je suis ébranlé... Il est certain que si nous avons la certitude que Franco comptait passer à l'action, avec l'accord d'Hitler, il devenait impossible d'envisager sérieusement la défense de l'AFN. Surtout par le fait qu'il y avait déjà 100 000 espagnols dans le Rif, prêts à franchir la frontière !
Et comment ces Espagnols sont-ils ravitaillés au travers du détroit, face à deux flottes puissantes et à une aviation française qui existe encore ? Avec des Allemands qui sont dans l'incapacité de prêter assistance avant de longues semaines ? Certes, les troupes espagnoles auraient pu engranger des succès. Mais Noguès dispose tout de même de moyens conséquents ! Je suis évidemment d'accord pour dire qu'un tel scénario aurait changé la face du conflit mondial. Toutefois, il faut éviter un raisonnement trop simple. Si la France continue, admettons donc qu'Hitler accepte l'offre de Franco et lui dise (il ne peut pas faire autrement, j'espère que tout le monde ici en conviendra) : "OK, allez-y, mais attention, vous ne pourrez recevoir aucune aide allemande avant un bon moment", Franco y serait allé quand même ? |
| | | dhouliez Admin
Nombre de messages : 9112 Date d'inscription : 21/11/2006
| Sujet: Re: Une résistance à la russe en France ? Jeu 20 Aoû 2020 - 22:02 | |
| - Loïc M. a écrit:
- @dhouliez : je ne déforme pas vos propos, en tout cas pas intentionnellement. Il n'est pas anormal qu'une discussion permettre des digressions, des réflexions annexes, si ?
"Ce que l'Espagne aurait pu faire si" ne vous semble peut-être pas important, mais me semble au contraire fondamental si on envisage que la France continue le combat (et pas qu'à moi, visiblement, vu la réponse de L. Martel). Pour les USA, je vous ai déjà donné mon point de vue : leur aide (payante ou pas ...) n'est pas si faible que cela et en juin 40 rien ne permet de dire dans quel sens elle va évoluer. Citons en vrac : les contrats d'armement, la fourniture de matériels en urgence, l'évacuation de l'or, l'embargo sur le pétrole à destination de l'Espagne à la demande de la GB suite à l'armistice (et probablement au coup de main de Tanger et aux revendications sur les territoires français), ... Il ne s'agit pas de digressions, ni de réflexions annexes. Il s'agissait de vouloir faire croire que, parce que j'exposais la situation internationale telle qu'elle pouvait être perçue, je légitimais la collaboration. Il s'agit ici, parce que j'explique que l'Espagne se montre hostile et a des vues sur des territoires français, de vouloir en faire, dans mon argumentaire, la cause principale voire unique de la démission de Reynaud et de la demande d'armistice de Pétain (en évacuant le problème de l'abandon de la population de la France continentale qui était centrale dans l'argumentation de Pétain). Ce sont bien des déformations qui n'aident pas la discussion, bien au contraire. Pour le reste, je ne vais faire que me répéter, je le crains : Ce que les dirigeants en juin 40, pouvaient percevoir des velléités de l'Espagne m'intéresse. Une analyse de ce que l'Espagne aurait pu faire si... à partir d'une analyse a posteriori ne m'intéresse pas (ce que toute la carrière de Franco montre, en juin 40, ce n'est pas très long). Est-ce que dit comme ça (répété plus exactement, car je l'ai déjà explicité) c'est plus clair ? Comme c'est moi qui ait abordé le problème de 'Espagne et que je ne discute pas d'une uchronie, ce serait sympathique d'en tenir compte. D'ailleurs, si je scinde ce fil, la discussion actuelle ne sera pas placée dans les uchronies. Les précisions de Louis Martel montrent que tout indiquait que l'Espagne était un pays hostile, ce qui confirme entièrement ce que je dis. Donc, la réalité est que l'hostilité de l'Espagne augmentait, qu'elle faisait des propositions à Hitler, que l'on ne voit pas très bien ce qui garantissait, en juin 40, que Franco n'entrerait jamais en guerre. Je rappelle que fin juin ou tout début juillet, l'analyse anglaise est qu'en cas d'attaque sur Gibraltar, ils n'ont pas les moyens de tenir le rocher. Preuve que l'hypothèse était prise au sérieux. Pour l'USA, vous m'avez répondu, en partie à côté et encore une fois ici : - avant l'armistice, il n'y a pas d'embargo américain sur le pétrole, inutile de le mentionner ; - le transport de l'or vers les USA n'est pour l'essentiel pas une mise à l'abri : c'est un paiement cash ou un envoi en partie en prévision de paiements cash. La quasi totalité des transports s'est fait sur des navires français. Le rôle des USA est donc mineur. - c'est facile d'évacuer le problème du paiement : si la France envisage une guerre longue, a-t-elle les moyens de reconstituer une armée sous le régime du cash and carry ? - "rien ne permet de dire dans quel sens elle va évoluer" : précisément, je ne dis rien d'autre. Vous confirmez donc que rien ne permet de prédire qu'elle se maintiendrait nécessairement, même si Roosevelt n'était pas réélu. et surtout : - et surtout, quand Reynaud explique que la dernière chance de maintenir la France en guerre est une entrée en guerre des USA, la réponse est non, vous êtes assez forts à deux et nous continuerons à vous vendre du matériel... Donc, l'analyse de la situation géostratégique de la France à la mi juin 40, c'est : - le Reich et l'Italie en guerre - l'URSS allié objectif qui neutralise les effets du blocus, d'autant plus depuis la perte de la Norvège - le principal allié, la GB, qui apparaît peu fiable - les USA qui refusent de s'engager à fond et monnayent leur aide, dont la politique dans ce qu'elle a de favorable, dépend apparemment beaucoup d'un président qui arrive en fin de mandat et n'est pas censé se représenter, et dont on peut penser de toutes façons que l'attitude dépendra de celle de la GB (cf point précédent) - l'Espagne qui montre des signes d'hostilité croissante Ce sont des faits. Vous n'avez rien apporté qui contredise ces faits. |
| | | dhouliez Admin
Nombre de messages : 9112 Date d'inscription : 21/11/2006
| Sujet: Re: Une résistance à la russe en France ? Jeu 20 Aoû 2020 - 22:22 | |
| - Citation :
- Hitler n'aurait certainement pas manqué d'essayer de l'exploiter au printemps 1941, si cela lui avait permis de s'économiser l'envoi de l'Afrika Korps pour sauver la mise aux Italiens et/ou pour en finir avec les Anglais avant de se lancer vers l'est (l'hypothèse d'une perte de Gibraltar et/ou Malte aurait-elle été le facteur déclenchant d'un abandon de Londres ?).
Je ne cherche pas à discuter d'une uchronie, mais néanmoins certaines remarques montrent que l'analyse est biaisée : en 1941, exploiter la convergence d'intérêt entre l'Espagne et l'Italie signifie prendre le très gros risque de voir l'Empire français basculer du côté des alliés. En juin 40, si l'armistice n'est pas demandé, la situation est totalement différente. La conjonction d'intérêt, c'est un partage de la Méditerranée en évinçant la Grande-Bretagne et en amputant la France d'une part significative de ses possessions méditerranéennes, ce n'est pas : à moi l'Egypte, à toi Gibraltar. Au moment de Montoire, Hitler a sondé Franco. Il connaît les conditions. Ce n'est pas Gibraltar pour toute récompense. |
| | | dhouliez Admin
Nombre de messages : 9112 Date d'inscription : 21/11/2006
| Sujet: Re: Une résistance à la russe en France ? Ven 21 Aoû 2020 - 23:18 | |
| Bonsoir, A propos d'une "'friction certaine [de l'Espagne] avec l'Italie pour l'influence en Méditerranée" (sic) : - Citation :
- Note de la sous-direction d'Europe
18 avril 1940
(...) le IIIe Reich ne parviendra pas, à lui seul, à faire sortir de leur neutralité les dirigeants de Madrid.
Il n'en va pas de même de l'Italie. (...) M. Mussolini a réussi à flatter les nouveaux dirigeants de l'Espagne, à les persuader que la communauté des régimes politiques leur imposait des devoirs communs : ceux de la sauvegarde et du développement de la civilisation méditerranéenne qui est le bien exclusif de l'Italie et de l'Espagne. A l'instigation de la politique fasciste, M. Serrano Suner et ses collègues prétendent restaurer l'impérialisme espagnol, mots assez vague sans doute, qui auront pour objet de faire oublier aux habitants de la Péninsule les difficultés matérielles de l'heure présente, mais qui n'en constituent pas moins un symptôme inquiétant pour l'avenir car c'est vers Gibraltar, et l'Afrique du Nord (Maroc et Oranie) que cet impérialisme naissant se trouve axé.
(...) Nous ne devons pas nous dissimuler que la neutralité de l'Espagne, dans le cas où M. Mussolini se déciderait à abandonner sa position actuelle de non-belligérance et à passer dans le camp de nos ennemis, deviendrait une chose extrêmement fragile et que le général Franco éprouverait très certainement de sérieuses difficultés s'il persistait, malgré la pression de ses conseillers, à ne pas vouloir s'engager dans le conflit. Cordialement, DH |
| | | Loïc M. Commandant
Nombre de messages : 619 Date d'inscription : 12/01/2009
| Sujet: Re: Une résistance à la russe en France ? Dim 23 Aoû 2020 - 0:45 | |
| Bonsoir,
Avant de revenir sur les messages précédents, deux questions sur ce dernier : - qu'est-ce que la "sous-direction d'Europe" ? - l'expression "friction certaine [de l'Espagne] avec l'Italie" voudrait-elle dire que ces deux pays pourraient être en désaccord ?
En tout cas, c'est un document intéressant à mettre en rapport avec ce que l'on sait des relations entre les deux pays. On peut noter que ce rapport souligne le fait que Franco joue un rôle de modérateur par rapport à d'autres plus extrémistes que lui (et ce fut d'ailleurs le cas jusqu'à la fin de son règne). Si les Alliés sont conscients de ce point, ce n'est pas négligeable.
Sur le même sujet, le document (en anglais) : "Fascist Italy and Spain, 1922–45" (Stanley G. Payne) que l'on peut trouver en ligne (https://www.tau.ac.il/humanities/cmc/mhr/132mhr06.pdf) contient un passage intéressant sur la période 1940-1941. En résumé, les relations entre les deux pays sont bonnes (le fascisme est vu comme un modèle pour la Phalange), même si Berlin, de par sa victoire sur la France, devient de plus en plus la référence pour l'Espagne, mais devient dans le même temps un maître exigeant. Toutefois, l'unique rencontre entre les deux dictateurs latins (Bordighera en février 1941) n'est pas concluante (Hitler ayant chargé Mussolini de persuader Franco d'entrer en guerre), du fait de la rivalité des deux pays concernant certaines parties de l'Algérie française et de la situation militaire désastreuse dans laquelle se trouve l'Italie à ce moment.
En ce qui concerne le point "Il s'agissait de vouloir faire croire que, parce que j'exposais la situation internationale telle qu'elle pouvait être perçue, je légitimais la collaboration." : loin de moi l'idée de faire de vous un chantre de la collaboration. Si mes propos ont pu le laisser entendre, je les retire.
Pour en revenir à l'Espagne, oui c'est un pays hostile, mais absolument rien ne garantit que Franco aurait sauté le pas si la France avait continué le combat (on peut d'ailleurs noter que l'occupation de Tanger fur annoncée par Franco comme une mesure temporaire de temps de guerre alors que certains en Espagne réclamaient l'annexion). Je n'ai pas vu de retour à ma remarque concernant le calendrier qui montre que la tension commence à retomber alors que les négociations d'armistice n'ont pas encore commencé. On peut penser que Hitler est à ce point certain (ou bien informé ?) que les Français vont accepter ses conditions qu'il exige que Franco arrête ses gesticulations pour ne pas mettre de l'huile sur le feu ou alors parce que ces gesticulations auraient atteint leur but (faire peur aux Français). Ou bien Hitler refuse la proposition espagnole car il n'en maîtrise pas l'issue, n'ayant aucun moyen à cette date de participer à la prise des territoires français d'Afrique du Nord (et donc sans garantie qu'il en retirera un bénéfice). Une autre possibilité serait que les Britanniques aient mis la pression sur le régime franquiste en évoquant, alors que le coup de force de Tanger vient d'avoir lieu et que la France s'apprête à négocier, la possibilité de représailles économiques en cas d'agression contre le Maroc.
Plus prosaïquement, l'Espagne n'a aucune réserve de pétrole et son unique raffinerie se trouve dans les Canaries. L'Allemagne ne peut pas fournir les ressources qu'elle demande. Comment mener une guerre dans ces conditions, même si on roule des mécaniques ?
Mais je suis d'accord qu'à ce stade du conflit, il n'y a plus suffisamment de coopération entre Anglais et Français pour qu'une telle menace contre Franco puisse renverser la ligne politique qui vient d'être prise en France. Ni de lucidité côté français pour percevoir que les menaces espagnoles d'entrer en guerre sont en grande partie de la gesticulation à finalité intérieure (les durs du régime) comme extérieure (Berlin principalement).
Concernant Gibraltar, oui les Anglais savent qu'elle est vulnérable, tout comme Malte. C'est du pur réalisme. Ce qui ne les empêchera pas de renforcer la défense de ces deux places, dès qu'ils le pourront.
Enfin, puisque vous évoquez l'analyse de la situation géostratégique de la France à la mi juin 40, vous pouvez ajouter : - l'Italie n'a pas réussi à forcer la barrière des Alpes malgré une nette supériorité et des Français en partie déjà démotivés ; la flotte italienne n'a pas davantage entravé les convois entre la métropole et l'Afrique - l'Allemagne n'a objectivement pas les moyens d'atteindre la France repliée dans son empire - l'Espagne sort d'une guerre très longue et son armée n'atteint à priori pas le niveau de l'armée italienne - les USA continueront à fournir du matériel et même si les moyens financiers français vont progressivement se tarir, il reste ceux de l'allié anglais |
| | | dhouliez Admin
Nombre de messages : 9112 Date d'inscription : 21/11/2006
| Sujet: Re: Une résistance à la russe en France ? Dim 23 Aoû 2020 - 9:42 | |
| Bonjour, - Citation :
- Avant de revenir sur les messages précédents, deux questions sur ce dernier :
- qu'est-ce que la "sous-direction d'Europe" ? - l'expression "friction certaine [de l'Espagne] avec l'Italie" voudrait-elle dire que ces deux pays pourraient être en désaccord ? Pardon, je pensais que la référence était transparente. Il s'agit de la sous-direction d'Europe du ministère des affaires étrangères. J'avoue ne pas comprendre la deuxième question. C'est vous qui avez utilisé l'expression pour démentir le risque (en juin 40) de voir l'Espagne entrer en guerre : - Loïc M a écrit:
- Et Franco donc va risquer de se mettre les USA et l'Angleterre (donc le Portugal) à dos ? Ah oui, et la France aussi, qui a quand même de beaux restes. Sans parler d'une friction certaine avec l'Italie pour l'influence en Méditerranée.
Ce que ce document montre, c'est que, tout bien pesé, en avril 40, les diplomates du Quai estiment qu'une entrée en guerre de l'Espagne dépend essentiellement de l'Italie, et que si Mussolini demande à Franco d'entrer en guerre, ce dernier ne pourra probablement pas refuser. Ensuite, à partir de mai-juin, l'attitude de l'Espagne devient plus conciliante dans les paroles et plus hostile dans les faits : Beigbeder assure le 11 juin que l'Espagne défendra sa neutralité (en avançant les arguments pétrole, situation matérielle...), mais le 12 elle ne se déclare plus neutre mais non belligérante, et le 14 prend possession de Tanger... Je ne vois pas ce que la remarque sur le fait que la GB ait renforcé ensuite les défenses de Gibraltar apporte à l'analyse de la situation en juin. Bref, vous admettez que "Pour en revenir à l'Espagne, oui c'est un pays hostile". C'est déjà un progrès. "mais absolument rien ne garantit que Franco aurait sauté le pas si la France avait continué le combat", ajoutez vous. Je n'ai jamais soutenu cela. Mais donc rien ne garantit non plus que Franco ne sautera pas le pas. Dans les faits, il a proposé à Hitler de sauter le pas. Le reste est spéculatif. - Citation :
- On peut penser que Hitler est à ce point certain (ou bien informé ?) que les Français vont accepter ses conditions
On peut dire simplement que Hitler a tout intérêt à ce que l'Empire français sorte de la guerre, et qu'il n'a pas envie que des seconds couteaux (Italie, Espagne) viennent compliquer l'affaire par des revendications excessives. Rien ne préjuge qu'il n'aurait pas donné suite à ses revendications si l'armistice n'avait pas été conclu. Mais dès lors que l'armistice est demandé, la logique est que les conditions soient acceptées si elles sont raisonnables. Il n'y a pas besoin d'être certain, ni informé (!!!!) - Citation :
- Je n'ai pas vu de retour à ma remarque concernant le calendrier qui montre que la tension commence à retomber alors que les négociations d'armistice n'ont pas encore commencé.
Je n'ai pas lu cette remarque, je veux bien que vous précisiez quand vous l'avez faite. J'ai lu que Hitler ne donnait pas suite à la proposition de Franco. Je ne pense pas que les alliés l'aient su. Le retrait des troupes est postérieur à la demande d'armistice. - Citation :
- Enfin, puisque vous évoquez l'analyse de la situation géostratégique de la France à la mi juin 40, vous pouvez ajouter :
- l'Italie n'a pas réussi à forcer la barrière des Alpes malgré une nette supériorité et des Français en partie déjà démotivés ; la flotte italienne n'a pas davantage entravé les convois entre la métropole et l'Afrique Résistance des Alpes : au moment de la demande d'armistice, les italiens n'ont pas lancé leur attaque générale, l'Armée des Alpes n'est pas particulièrement démotivée. Il n'y a pas de fortifications équivalentes à la ligne Maginot dans le Rif. Si l'on se retire en Afrique il n'y aura plus de convois entre la Métropole et l'Afrique. - Citation :
- - l'Allemagne n'a objectivement pas les moyens d'atteindre la France repliée dans son empire
- l'Espagne sort d'une guerre très longue et son armée n'atteint à priori pas le niveau de l'armée italienne - les USA continueront à fournir du matériel et même si les moyens financiers français vont progressivement se tarir, il reste ceux de l'allié anglais Pour l'Allemagne, c'est une analyse a posteriori, conditionnée en partie par l'attitude de l'Espagne, et pour le débat de juin 40, ça ne change rien au fait que le débat porte en grande partie sur l'abandon des populations. Pour les USA et la GB, j'ai déjà répondu plusieurs fois, donc ça ne sert à rien de me dire "vous pouvez ajouter", j'ai déjà avancé les arguments qui le contredisent. : la GB ne paraît pas fiable, les réserves d'or ne sont pas inépuisables, rien ne garantit, sinon des promesses, que les USA ne vont pas faire machine arrière... Je rappelle, ou je précise si malgré tout ça n'a pas encore été compris, que si je débats, ce n'est pas pour critiquer le scenario d'une uchronie, mais pour combattre l'idée plus ou moins suggérée qu'en juin 40 les dirigeants français auraient dû savoir : - que Hitler se serait, quoi qu'il arrive, retourné contre l'URSS avant la fin du conflit à l'ouest - que l'Espagne serait restée à l'écart - que la GB serait restée coûte que coûte en guerre - que les USA auraient quoi qu'il arrive maintenu leur aide, en en rendant le coût acceptable, même si la GB avait fait défection.
Dernière édition par dhouliez le Dim 23 Aoû 2020 - 9:54, édité 1 fois |
| | | dhouliez Admin
Nombre de messages : 9112 Date d'inscription : 21/11/2006
| Sujet: Re: Une résistance à la russe en France ? Dim 23 Aoû 2020 - 9:45 | |
| - Citation :
- Sur le même sujet, le document (en anglais) : "Fascist Italy and Spain, 1922–45" (Stanley G. Payne) que l'on peut trouver en ligne (https://www.tau.ac.il/humanities/cmc/mhr/132mhr06.pdf) contient un passage intéressant sur la période 1940-1941.
En résumé, les relations entre les deux pays sont bonnes (le fascisme est vu comme un modèle pour la Phalange), même si Berlin, de par sa victoire sur la France, devient de plus en plus la référence pour l'Espagne, mais devient dans le même temps un maître exigeant. Toutefois, l'unique rencontre entre les deux dictateurs latins (Bordighera en février 1941) n'est pas concluante (Hitler ayant chargé Mussolini de persuader Franco d'entrer en guerre), du fait de la rivalité des deux pays concernant certaines parties de l'Algérie française et de la situation militaire désastreuse dans laquelle se trouve l'Italie à ce moment. Donc, en résumé, en février 41 il est trop tard, parce que si l'Espagne entre en guerre, elle fait basculer l'Empire du côté des alliés, alors que les gains territoriaux deviennent aléatoires. Dis d'une autre manière, février 41, ce n'est pas juin 40. |
| | | Loïc M. Commandant
Nombre de messages : 619 Date d'inscription : 12/01/2009
| Sujet: Re: Une résistance à la russe en France ? Dim 23 Aoû 2020 - 10:37 | |
| Merci pour la référence. - dhouliez a écrit:
- Ce que ce document montre, c'est que, tout bien pesé, en avril 40, les diplomates du Quai estiment qu'une entrée en guerre de l'Espagne dépend essentiellement de l'Italie, et que si Mussolini demande à Franco d'entrer en guerre, ce dernier ne pourra probablement pas refuser.
En effet, avant mai-juin 1940, la référence espagnole est Mussolini, après cela devient Hitler. Ceci dit, on a deux pays qui se disent neutres avant juin 1940. Donc si les deux devaient se coordonner pour entrer en guerre, cela ne se ferait pas sur un claquement de doigts non plus. La situation intérieure espagnole, avec Franco modérant les plus extrémistes de son régime, est connue au moins des Anglais et donc, d'après ce document, des Français. - dhouliez a écrit:
- Ensuite, à partir de mai-juin, l'attitude de l'Espagne devient plus conciliante dans les paroles et plus hostile dans les faits : Beigbeder assure le 11 juin que l'Espagne défendra sa neutralité (en avançant les arguments pétrole, situation matérielle...), mais le 12 elle ne se déclare plus neutre mais non belligérante, et le 14 prend possession de Tanger...
Et moins d'une semaine plus tard, les troupes espagnoles se replient. - dhouliez a écrit:
- Bref, vous admettez que "Pour en revenir à l'Espagne, oui c'est un pays hostile". C'est déjà un progrès.
Le point est connu depuis longtemps. Je n'avais pas forcément connaissance du détail des gesticulations espagnoles. - dhouliez a écrit:
- "mais absolument rien ne garantit que Franco aurait sauté le pas si la France avait continué le combat", ajoutez vous. Je n'ai jamais soutenu cela. Mais donc rien ne garantit non plus que Franco ne sautera pas le pas.
La connaissance (que les Alliés ont forcément) de l'état réel de l'économie (des infrastructures, de l'armée, etc) espagnole permettait toutefois de douter d'une capacité espagnole de mener une guerre longue contre des alliés déterminés ... s'ils l'avaient encore été. - dhouliez a écrit:
- On peut dire simplement que Hitler a tout intérêt à ce que l'Empire français sorte de la guerre, et qu'il n'a pas envie que des seconds couteaux (Italie, Espagne) viennent compliquer l'affaire par des revendications excessives. Rien ne préjuge qu'il n'aurait pas donné suite à ses revendications si l'armistice n'avait pas été conclu.
Nous sommes d'accord qu'aucune certitude n'existe sur la possibilité que l'Espagne entre en guerre ou pas. - dhouliez a écrit:
- Loïc M. a écrit:
- Je n'ai pas vu de retour à ma remarque concernant le calendrier qui montre que la tension commence à retomber alors que les négociations d'armistice n'ont pas encore commencé.
Je n'ai pas lu cette remarque, je veux bien que vous précisiez quand vous l'avez faite. J'ai lu que Hitler ne donnait pas suite à la proposition de Franco. Je ne pense pas que les alliés l'aient su. Remarque faite le Jeu 20 Aoû 2020 - 17:15 : - Loïc M. a écrit:
- Les négociations d'armistice commencent le 21. Le 19, Hitler donne donc la priorité à la négociation, sans connaître l'avance le résultat de celle-ci, une nuance importante.
Avant même l'acceptation formelle de la délégation française (qui a des ordres précis sur ce qu'elle peut accepter ou pas), Hitler rejette les demandes de Franco. Et Franco n'insiste pas. Aucune chance que les Alliés aient eu vent de ces tractations entre Madrid et Berlin ? Quoiqu'il en soit, avant même le début des (ou en cours de) négociations, Noguès a bien dû signaler le retrait des troupes espagnoles. Donc les Français notent bien l'agressivité puis le recul espagnols en l'espace d'une semaine, alors que leur propre situation se détériore grandement dans le même temps. - dhouliez a écrit:
- Résistance des Alpes : au moment de la demande d'armistice, les italiens n'ont pas lancé leur attaque générale, l'Armée des Alpes n'est pas particulièrement démotivée.
Pas davantage que l'ensemble des troupes françaises suite à l'appel de Pétain à cesser le combat. - dhouliez a écrit:
- Il n'y a pas de fortifications équivalentes à la ligne Maginot dans le Rif.
Mais il y a en AfN une aviation et une marine largement plus conséquentes à ce que les Espagnols peuvent aligner (point tout de même important si l'Espagne veut mener une guerre à cheval sur deux continents). Ainsi que des troupes en nombre en nombre assez conséquent aussi et notamment des blindés. - dhouliez a écrit:
- Si l'on se retire en Afrique il n'y aura plus de convois entre la Métropole et l'Afrique.
Je pensais plutôt aux tentatives italiennes (aériennes et navales) d'intercepter les convois d'évacuation à partir du 12 juin (il me semble) et qui ne furent guère couronnées de succès. - dhouliez a écrit:
- Pour l'Allemagne, c'est une analyse a posteriori, conditionnée en partie par l'attitude de l'Espagne
Pourquoi à posteriori ? Les Alliés ignorent donc l'état réel de l'Espagne et s'imaginent que les troupes et l'aviation allemandes seront à pied d'oeuvre dans le sud de la péninsule en quelques semaines ? |
| | | dhouliez Admin
Nombre de messages : 9112 Date d'inscription : 21/11/2006
| Sujet: Re: Une résistance à la russe en France ? Dim 23 Aoû 2020 - 11:58 | |
| - Loïc M. a écrit:
- dhouliez a écrit:
- Loïc M. a écrit:
- Je n'ai pas vu de retour à ma remarque concernant le calendrier qui montre que la tension commence à retomber alors que les négociations d'armistice n'ont pas encore commencé.
Je n'ai pas lu cette remarque, je veux bien que vous précisiez quand vous l'avez faite. J'ai lu que Hitler ne donnait pas suite à la proposition de Franco. Je ne pense pas que les alliés l'aient su. Remarque faite le Jeu 20 Aoû 2020 - 17:15 :
- Loïc M. a écrit:
- Les négociations d'armistice commencent le 21. Le 19, Hitler donne donc la priorité à la négociation, sans connaître l'avance le résultat de celle-ci, une nuance importante.
Avant même l'acceptation formelle de la délégation française (qui a des ordres précis sur ce qu'elle peut accepter ou pas), Hitler rejette les demandes de Franco. Et Franco n'insiste pas. Aucune chance que les Alliés aient eu vent de ces tractations entre Madrid et Berlin ? Quoiqu'il en soit, avant même le début des (ou en cours de) négociations, Noguès a bien dû signaler le retrait des troupes espagnoles. Donc les Français notent bien l'agressivité puis le recul espagnols en l'espace d'une semaine, alors que leur propre situation se détériore grandement dans le même temps. C'est bien la phrase à laquelle je pensais. Je maintiens que vous ne parlez pas de tension qui retombe. Il n'y a pas lieu de penser que Franco ait rendu publiques ses propositions à Hitler... pour envisager que les alliés en aient eu vent, et de la réponse d'Hitler, il s'agirait de produire quelque document, sinon on peut tout imaginer. Vous évoquez des tractations secrètes, pas le retrait des troupes. La tension retombe une fois que les alliés ont demandé l'armistice. C'est ce j'ai fait remarquer dans la phrase suivante du paragraphe que vous citez. "Le retrait des troupes est postérieur à la demande d'armistice." J'ai par ailleurs déjà répondu par avance à vos remarques : une fois que l'armistice est demandé, les conditions changent. Puisque les espagnols étaient apparemment prêts à attaquer avant la demande d'armistice, on peut envisager qu'ils se montrent à nouveau hostiles si l'armistice est refusé. En juin 40, l'attitude de l'Espagne peut se comprendre comme une inféodation totale à l'Allemagne (j'insiste : peut, pas doit). "Je suis prêt pour le coup de grâce. Vous demandez l'armistice : je vous laisse tranquille, mais je vous ai montré que si Hitler me le demande, je peux vous attaquer." - Citation :
- dhouliez a écrit:
- Résistance des Alpes : au moment de la demande d'armistice, les italiens n'ont pas lancé leur attaque générale, l'Armée des Alpes n'est pas particulièrement démotivée.
Pas davantage que l'ensemble des troupes françaises suite à l'appel de Pétain à cesser le combat. Très probablement moins. En partie parce que pour des troupes solidement installés, l'appel de Pétain peut être compris pour ce qu'il est, et qui sera précisé dès le lendemain : l'annonce qu'il faut se résoudre à un armistice, mais pas l'ordre de déposer les armes tout de suite. La preuve, c'est que là où le commandement était solide, l'intervention n'a pas été interprétée comme un ordre de cessez-le-feu immédiat. Evidemment, cette phrase "C'est le coeur serré...", totalement inappropriée, peut être comprise (et a été comprise) différemment par des troupes qui sont déjà démoralisées, parce qu'en retraite depuis des jours, ou parce que pas destinées à combattre (troupes de l l'intérieur par exemple). - Citation :
- dhouliez a écrit:
- Si l'on se retire en Afrique il n'y aura plus de convois entre la Métropole et l'Afrique.
Je pensais plutôt aux tentatives italiennes (aériennes et navales) d'intercepter les convois d'évacuation à partir du 12 juin (il me semble) et qui ne furent guère couronnées de succès. J'avais bien compris. - Citation :
- dhouliez a écrit:
- Il n'y a pas de fortifications équivalentes à la ligne Maginot dans le Rif.
Mais il y a en AfN une aviation et une marine largement plus conséquentes à ce que les Espagnols peuvent aligner (point tout de même important si l'Espagne veut mener une guerre à cheval sur deux continents). Ainsi que des troupes en nombre en nombre assez conséquent aussi et notamment des blindés. (...)
- dhouliez a écrit:
- Pour l'Allemagne, c'est une analyse a posteriori, conditionnée en partie par l'attitude de l'Espagne
Pourquoi à posteriori ? Les Alliés ignorent donc l'état réel de l'Espagne et s'imaginent que les troupes et l'aviation allemandes seront à pied d'oeuvre dans le sud de la péninsule en quelques semaines ? Quelques semaines, pourquoi pas ou quelques mois, ça ne change pas grand chose à la situation, puisqu'au 16 juin, il n'y a plus de possibilité de renforcer l'AFN en personnel formé et équipé. Vous admettez vous même cet état de fait, puisque vous avez considéré que pour rendre crédible votre uchronie (et vous en avez bien le droit, je n'en discute pas) il fallait avancer le point de divergence d'une petite dizaine de jours par rapport au moment où l'option a sérieusement été envisagée historiquement. Le risque n'est pas absolument pas que l'Espagne mène une guerre seule, mais qu'elle appuie l'Axe et laisse passage à la Wehrmacht. Avec comme possibilité à envisager que l'Angleterre jette l'éponge et que la France se retrouve à terme avec l'Italie, l'Espagne et le Reich contre elle. - Citation :
- Nous sommes d'accord qu'aucune certitude n'existe sur la possibilité que l'Espagne entre en guerre ou pas.
Eh bien on ne dirait pas ! Donc en résumé : - Italie et Allemagne en guerre - URSS alliée objective des deux - Espagne qui pourrait entrer en guerre - GB qui pourrait jeter l'éponge - USA qui pourraient dès lors ne plus aider activement la France - USA qui de toutes façons pourraient, sous l'influence de facteurs internes, redevenir plus isolationnistes (dans le "soutien total" des USA, il y a quand même Roosevelt qui explique qu'il ne veut pas se fâcher avec (ou fâcher) Mussolini en intervenant trop directement pour éviter une entrée en guerre de l'Italie, ce serait d'après lui contre-productif, mais qu'il fait intervenir à sa place d'autres pays - Brésil et Argentine de mémoire) |
| | | Loïc M. Commandant
Nombre de messages : 619 Date d'inscription : 12/01/2009
| Sujet: Re: Une résistance à la russe en France ? Dim 23 Aoû 2020 - 15:47 | |
| - dhouliez a écrit:
- Je maintiens que vous ne parlez pas de tension qui retombe.
L'armistice n'étant pas signé, Franco espère sans doute encore grignoter quelque chose ? - dhouliez a écrit:
- Il n'y a pas lieu de penser que Franco ait rendu publiques ses propositions à Hitler... pour envisager que les alliés en aient eu vent, et de la réponse d'Hitler, il s'agirait de produire quelque document, sinon on peut tout imaginer.
L'entourage de Franco est infiltré par les Britanniques, qui ont recours, sur suggestion du nouvel ambassadeur Hoare, à la corruption active de hauts dignitaires pour maintenir l'Espagne hors du conflit. Par contre, les Français ne le savent sans doute pas. Sources (surtout la deuxième qui indique les noms des personnalités arrosées et détaille bien les factions en présence en Espagne) : - https://www.thelocal.es/20130524/mi6-kept-spain-from-hitler-with-bribes - https://english.elpais.com/elpais/2013/06/03/inenglish/1370283643_748941.html - https://core.ac.uk/download/pdf/43496239.pdf - 1er juin : arrivée de Hoare à Madrid - 4 juin : Hoare signale à Londres que Madrid va prochainement abandonner son statut de neutre ; accord de Churchill pour une action de corruption - 9 juin : Hoare signale que les négociations sont en bonne voie, mais prévient que des fonds supplémentaires seront nécessaires - 14 et 15 juin : échanges entre le Foreign Office et Hoare - 21 juin : le Foreign Office signale que les fonds ont été virés (Geneva Swiss Bank à New York) - 28 juin : Hoare signale que l'opération a porté ses fruits ; le général Juan Yagüe, ministre de l'Air et principal soutien à la guerre, a été renvoyé Il n'est pas exclus que Hoare ait pris la liberté d'évoquer avec ses interlocuteurs la situation de Gibraltar pour l'après-guerre (source : https://www.majorcadailybulletin.com/comment/letters-the-editor/2005/01/05/10713/gibraltar-and-franco.html), mais ceci n'est pas avéré. - dhouliez a écrit:
- En juin 40, l'attitude de l'Espagne peut se comprendre comme une inféodation totale à l'Allemagne (j'insiste : peut, pas doit). "Je suis prêt pour le coup de grâce. Vous demandez l'armistice : je vous laisse tranquille, mais je vous ai montré que si Hitler me le demande, je peux vous attaquer."
Cette inféodation débute en juin 1940, mais ce n'est sans doute pas une bascule instantanée. En cas d'armistice non demandé ou rejeté, on ne peut toujours pas savoir si Franco aurait franchi le pas, cf. ci-dessus le rôle joué par les Britanniques. Concernant Roosevelt : son intention d'éviter l'entrée en guerre de l'Italie tient-elle encore après le 10 juin ? Et si l'Espagne fait à son tour le coup du poignard dans le dos (fermant qui plus est potentiellement l'accès à la Méditerranée), les USA vont toujours rester isolationnistes ? La date fondatrice du Two-Navy Act est le 17 juin, quelques jours après la chute de Paris, alors qu'il n'est pas encore question d'armistice (l'appel de Pétain date du même jour). Autant vous avez souligné l'évolution de l'attitude espagnole lorsqu'il apparaît que les Allemands ont gagné, autant ne négligez pas celle des USA. D'autant plus que Churchill a clairement fait savoir dans un courrier à Roosevelt que lui et son cabinet sont déterminés à lutter jusqu'au bout, mais pourraient se retrouver empêchés dans cette tâche (en clair : renversés ou bien évidemment en cas d'invasion allemande). Le soutien des USA devient alors total. - dhouliez a écrit:
- [...] puisqu'au 16 juin, il n'y a plus de possibilité de renforcer l'AFN en personnel formé et équipé.
Pas d'accord, il y a plusieurs divisions du Commonwealth qui sont en route, dont une (il faudrait que je retrouve laquelle) était d'ailleurs pressentie pour débarquer à Marseille. |
| | | dhouliez Admin
Nombre de messages : 9112 Date d'inscription : 21/11/2006
| Sujet: Re: Une résistance à la russe en France ? Dim 23 Aoû 2020 - 18:13 | |
| Je ne comprends pas votre première remarque. Votre deuxième remarque : Les anglais ont corrompu des espagnols, vous en avez trace. Très bien. Les gens corrompus sont très fiables, évidemment, c'est leur caractéristique... Donc, parce que les anglais graissent la patte à certains espagnols pour éviter l'entrée en guerre de l'Espagne, les Français sont nécessairement au courant des propositions de Franco à Hitler et du refus de ce dernier ? Quel rapport entre ce que nous discutons et Hoare/Gibraltar ? Troisième remarque : Je dis "peut se comprendre comme une inféodation". Quel est le sens de "ce n'est sans doute pas une bascule instantanée" ? Je n'ai pas dit que dans les faits l'Espagne était inféodée, j'ai dit que l'on pouvait le penser en juin 40. J'espère que vous avez compris que j'essaie de me placer assez systématiquement en juin 40, avec ce que l'on savait à ce moment ? En définitive, ce qui pourrait sembler une réponse n'en est pas une. Cela dit, vous avez admis que "Nous sommes d'accord qu'aucune certitude n'existe sur la possibilité que l'Espagne entre en guerre ou pas." Vous le regrettez et voulez revenir là-dessus ? Quel est le sens de votre "on ne peut toujours pas savoir si Franco aurait franchi le pas, cf. ci-dessus le rôle joué par les Britanniques." Ben non, on ne peut toujours pas savoir ni dans un sens ni dans un autre. Je n'ai jamais écris quoique ce soit qui puisse se traduire par "on peut être certain que Franco aurait franchi le pas". Il est certain qu'il en a fait la proposition à Hitler. Je ne comprends pas vos remarques concernant Roosevelt et l'Italie, ni Churchill et Roosevelt. Pour l'attitude des USA, je ne néglige rien, je n'ai jamais dit que la relative défiance envers les USA était pertinente, j'ai écris que, en juin 40 : - ce que vous dites de la participation des USA à l'évacuation de l'or, n'a pas le poids argumentaire que vous prétendez (parce que la participation matérielle à l'évacuation est marginale et que pour une bonne part, l'or est transporté pour payer cash, donc qu'après son transport ce n'est plus de l'or français, mais de l'or américain). - l'engagement américain est valable dans une situation où France et GB continuent la guerre, il peut être douteux si la GB s'accommodait avec le Reich. - l'engagement américain semble beaucoup dépendre de l'action personnelle de Roosevelt qui n'est pas censé se représenter - parfois Roosevelt lui-même envoie des signes "tièdes" - la fourniture d'armes n'est pas gratuite et les réserves d'or ne sont pas inépuisables pour reconstituer une armée - enfin quand Reynaud a demandé à Roosevelt d'engager à fond les Etats-Unis (i.e. entrer en guerre aux côtés des alliés) en disant que c'était la seule chance de résister encore, la réponse a été non. La demande de crédits pour le Two-ocean navy act date du 17 juin, mais le vote du 19 juillet. Il y a trace d'une communication à ce propos des USA vers la France ? Bref, globalement, la perception de la situation que l'on peut avoir à chaud en 1940, est très loin d'être aussi claire et favorable à la continuation de la guerre que vous semblez l'expliquer. Bien que encore une fois, je ne sais pas si vous vous placez dans l'histoire ou dans la défense de la crédibilité d'un scenario uchronique dont je ne discute en fait pas. - Citation :
- dhouliez a écrit:
- [...]puisqu'au 16 juin, il n'y a plus de possibilité de renforcer l'AFN en personnel formé et équipé.
Pas d'accord, il y a plusieurs divisions du Commonwealth qui sont en route, dont une (il faudrait que je retrouve laquelle) était d'ailleurs pressentie pour débarquer à Marseille. Vous écrivez AfN, j'écris AFN, je suppose qu'il n'y a pas besoin d'expliciter. Je veux bien la référence pour cette division du Commonwealth prévue pour Marseille, mais est-ce bien avant l'entrée en guerre de l'Italie ? Quoiqu'il en soit, dans l'analyse des dirigeants français qui ne font plus confiance aux anglais, ça ne change rien.
Dernière édition par dhouliez le Dim 23 Aoû 2020 - 23:13, édité 1 fois (Raison : précision) |
| | | dhouliez Admin
Nombre de messages : 9112 Date d'inscription : 21/11/2006
| Sujet: Re: Une résistance à la russe en France ? Dim 23 Aoû 2020 - 18:33 | |
| Je reviens un instant sur les documents prouvant la corruption active de hauts dignitaires espagnols. Si l'on rapproche le déroulé de cette opération des éléments livrés par Louis Martel, cela donne : - les anglais envisagent la corruption - Franco propose à Hitler son aide active - Hitler refuse - les anglais approvisionnent un compte - le principal partisan espagnol d'une entrée en guerre est viré... Peut-on penser que le départ de Yagüe serait davantage lié au refus de Hitler qu'à la corruption des cadres ? J'ai l'impression que la satisfaction de Hoare prouve que les anglais n'étaient pas au courant des offres de Franco à Hitler. Pour le reste, les articles que vous citez semblent bien aller dans mon sens : - Citation :
- On June 4, 1940, the British ambassador to Madrid, Sir Samuel Hoare, sent an urgent encoded “personal” message to British Foreign Secretary Viscount Halifax. In it he revealed that there were signs Spain might soon abandon its neutral position and enter World War II on the side of the Nazis.
soit (traduction DeepL pour plus de commodité) - Citation :
- Le 4 juin 1940, l'ambassadeur britannique à Madrid, Sir Samuel Hoare, envoie un message urgent codé "personnel" au ministre britannique des Affaires étrangères, le Vicomte Halifax. Dans ce message, il révèle que certains signes indiquent que l'Espagne pourrait bientôt abandonner sa position de neutralité et entrer dans la Seconde Guerre mondiale aux côtés des nazis.
|
| | | Loïc M. Commandant
Nombre de messages : 619 Date d'inscription : 12/01/2009
| Sujet: Re: Une résistance à la russe en France ? Dim 23 Aoû 2020 - 23:37 | |
| - dhouliez a écrit:
- Je ne comprends pas votre première remarque.
Quand vous avez écrit "Je maintiens que vous ne parlez pas de tension qui retombe.", j'ai cru comprendre (je me trompe peut-être) que même avec le retrait des troupes espagnoles, les revendications de ces derniers étaient toujours affirmées haut et fort (notamment dans la presse). - dhouliez a écrit:
- Les anglais ont corrompu des espagnols, vous en avez trace. Très bien. Les gens corrompus sont très fiables, évidemment, c'est leur caractéristique... Donc, parce que les anglais graissent la patte à certains espagnols pour éviter l'entrée en guerre de l'Espagne, les Français sont nécessairement au courant des propositions de Franco à Hitler ?
La liste des personnes concernées n'est quand même pas anodine. Cette action britannique a été initiée au tout début juin, moment où les rapports avec la France pouvaient encore signifier quelque chose. Par la suite, au moment où cela s'est concrétisé, il est certes douteux que les Français aient été mis au courant. Pour compléter le calendrier, mes ajouts et reprises en rouge : - dhouliez a écrit:
- - les anglais envisagent la corruption le 4 juin, ayant été avisés que l'Espagne va prochainement abandonner son statut de neutre
- 9 juin l'ambassadeur français est informé du prochain passage à la non-belligérance de l'Espagne - 12 juin L'Espagne se déclare non-belligérante - 13 juin début du déploiement des forces espagnoles présentes au Maroc - 14 juin Les forces espagnoles occupent la zone de Tanger jusqu'alors sous contrôle français - Franco propose à Hitler son aide active le 17 - Nuit du 17 au 18 juin : déploiement des forces espagnoles en direction de la frontière interzonale - Hitler refuse le 19 - entre le 4 et le 21, Hoare "travaille au corps" (via son intermédiaire, le banquier Juan March) ses interlocuteurs espagnols - à priori, de l'argent a déjà changé de mains avant le 21, même si l'opération semble patiner un peu, avec toutefois des signaux encourageants (cf. une lettre de Hillgarth qui est l'attaché naval de l'ambassade, à Churchill datée de ce jour et peut-être remise en mains propres à ce dernier par Furse, l'assistant de Hillgarth), phrase trouvée dans "Man of War, Duff Hart-Davis, extrait sur Google Books page 213) - les anglais approvisionnent un compte le 21 - 20 juin et jours suivants : Repli des troupes espagnoles postées sur la limite inter-zonale marocaine. - Finalement Hitler rejette la proposition espagnole le 25 juin, une fois certain de l'acceptation des conditions d'armistice par le gouvernement français, et donc de la neutralisation de l'Afrique du Nord: le concours espagnol n'est plus nécessaire (cf. L'ambassade espagnole de Pétain, Michel Catala) - Furse fait un rapport le 26 : l'ambassade pensait que l'Espagne était sur le point d'entrer en guerre et que seule l'adoption de cette stratégie pouvait l'éviter. Selon elle, Franco souhaitait rester neutre mais était terrifié par l'Allemagne (traduction DeepL d'un extrait du second lien que j'ai donné) - le principal partisan espagnol d'une entrée en guerre est viré le 27... - Hoare signale le succès de l'opération le 28... On trouve aussi quelques mentions de cette affaire dans "Blowing up the Rock: German, Italian and Spanish Sabotage attacks on Gibraltar during the Second World War" (Bernard O'Connor, extraits sur Google Books) - dhouliez a écrit:
- Peut-on penser que le départ de Yagüe serait davantage lié au refus de Hitler qu'à la corruption des cadres ?
A propos de Yagüe, la page Wikipedia espagnole (traduction DeepL) indique : - Citation :
- Le 27 juin 1940, il est démis de ses fonctions par Franco et confiné dans sa ville natale, San Leonardo, à Soria. Le prétexte officiel était d'avoir dit à l'ambassadeur des États-Unis que le Royaume-Uni était vaincu et qu'il le méritait [Note : Wikipedia français indique "il s'est réjoui des revers de l'Angleterre"]. En réalité, Yagüe était devenu plus explicite dans sa critique de Franco et en s'opposant à la politique de vengeance de Franco, il réhabilitait des officiers d'aviation républicains, et s'était même impliqué dans un complot visant à renverser Franco, qui fut découvert par les services secrets. Il fut remplacé dans son poste ministériel par le général Juan Vigón.
Difficile de trancher entre les deux hypothèses, peut-être un mélange des deux (Franco trouve un prétexte pour placardiser son ministre qui devient gênant à tout point de vue ?). - dhouliez a écrit:
- J'ai l'impression que la satisfaction de Hoare prouve que les anglais n'étaient pas au courant des offres de Franco à Hitler.
Difficile à dire là aussi ... Madrid est un véritable nid d'espions (d'après ce qu'on peut comprendre à la lecture des différents documents). En plus, cet argent a servi à l'enrichissement personnel de l'intermédiaire. Enfin, il reste ce soupçon sur le rôle des services secrets anglais sur l'accession au pouvoir de Franco. Même si ceci est une autre histoire, ce n'est pas forcément neutre, car cela implique des liens qui existent avant 1940. - dhouliez a écrit:
- Quel rapport entre ce que nous discutons et Hoare/Gibraltar ?
J'ai mentionné cette information étant donné que vous aviez indiqué que les Anglais savaient Gibraltar vulnérable. Ceci pour mettre en lumière le fait que même dans cette situation (que je ne conteste pas), le Foreign Office ne considérait pas le Rocher comme négociable pour autant (même si Hoare l'a peut-être mentionné au cours de ses négociations/corruptions, car Churchill avait considéré que cette question était in fine à l'appréciation de l'ambassadeur). - dhouliez a écrit:
- Je dis "peut se comprendre comme une inféodation". Quel est le sens de "ce n'est sans doute pas une bascule instantanée" ?
Que jusqu'en mai 1940, l'Espagne se voyait sur la même longueur d'onde que Rome et que par la suite, mais pas du jour au lendemain, Madrid s'aligne plutôt sur Berlin (mais conserve de bonnes relations avec Rome). - dhouliez a écrit:
- Cela dit, vous avez admis que "Nous sommes d'accord qu'aucune certitude n'existe sur la possibilité que l'Espagne entre en guerre ou pas."
Vous le regrettez et voulez revenir là-dessus ? je donne l'impression de le regretter ? C'est juste un fait. - dhouliez a écrit:
- Je ne comprends pas vos remarques concernant Roosevelt et l'Italie, ni Churchill et Roosevelt.
Ce que je fais remarquer, c'est que l'attitude américaine change à partir du moment où la France semble bel et bien perdue et que l'Oncle Sam réalise, entre autres choses, que l'Allemagne va pouvoir baser des sous-marins sur les côtes françaises. Or, les USA ont déjà l'expérience d'une campagne sous-marine dont ils ont souffert. Mais cette prise de conscience est évidemment trop tardive. Pour le reste, aucun problème concernant vos arguments à propos des USA. - dhouliez a écrit:
- La demande de crédits pour le Two-ocean navy act date du 17 juin, mais le vote du 19 juillet. Il y a trace d'une communication à ce propos des USA vers la France ?
Il serait intéressant de le voir. Entre les 2 dates, il doit y avoir de nombreuses consultations qui vont aboutir au texte de loi ... Si des spécialistes de la chose navale pouvaient nous éclairer ... - dhouliez a écrit:
- Bref, globalement, la perception de la situation que l'on peut avoir à chaud en 1940, est très loin d'être aussi claire et favorable à la continuation de la guerre que vous semblez l'expliquer. Bien que encore une fois, je ne sais pas si vous vous placez dans l'histoire ou dans la défense de la crédibilité d'un scenario uchronique dont je ne discute en fait pas.
Tout dépend de la période à laquelle l'on fait cette perception. Comme vous l'avez souligné plus haut, à la mi-juin, il n'y a plus beaucoup d'options côté français (d'où le choix du point de divergence plus précoce pour la FTL). Et pour ma part, l'analyse des faits historiques sert à nourrir ma réflexion sur l'uchronie. - dhouliez a écrit:
- Je veux bien la référence pour cette division du Commonwealth prévue pour Marseille, mais est-ce bien avant l'entrée en guerre de l'Italie ?
(Oui, AFN, désolé). La division est la 6ème australienne, cf. https://en.wikipedia.org/wiki/Second_Australian_Imperial_Force_in_the_United_Kingdom#Arrival_in_the_UK À l'entraînement en Palestine depuis le début 1940, elle doit rejoindre la BEF et former à terme le 1er corps australien (avec la 7e division qui a été formée en avril). Voici la traduction (DeepL) du passage qui nous intéresse : - Citation :
- Le 4 juin, le chef de l'état-major général australien, le général Brudenell White, recommande au cabinet de guerre le transfert immédiat de la 6e division du Moyen-Orient à Marseille en France afin d'achever ses préparatifs de combat avant d'y entrer. La plupart des éléments du BEF sont alors évacués de Dunkerque, mais le gouvernement britannique a l'intention de la reconstituer en France. La 6e division n'est pas prête au combat, car elle n'a pas encore terminé son entraînement ni reçu son équipement clé [Note : c'est aussi le cas des 2 brigades australiennes et de la brigade néo-zélandaise qui arrivent en GB le 17 juin via le convoi US.3, ce qui n'empêche pas les Britanniques de les mettre en situation de défendre le pays dès la menace du débarquement allemand quelques semaines plus tard]. Le cabinet de guerre rejeta la proposition de White et accepta de rappeler au gouvernement britannique ses précédentes assurances selon lesquelles l'AIF serait concentrée en un seul endroit.
C'est donc à priori une décision politique, couplée à la détérioration rapide de la situation en France qui conduisent à ne pas prendre cette décision. Mais à priori avant le 10 juin. - dhouliez a écrit:
- Quoiqu'il en soit, dans l'analyse des dirigeants français qui ne font plus confiance aux anglais, ça ne change rien.
Certes oui, dès l'instant où Pétain remplace Reynaud, la messe est dite. Il faudrait vraiment séparer ces échanges et oui, pas dans la section uchronie bien sûr. |
| | | Louis Martel Commandant
Nombre de messages : 611 Localisation : Sud-ouest Date d'inscription : 13/06/2009
| Sujet: Re: Une résistance à la russe en France ? Lun 24 Aoû 2020 - 11:14 | |
| Bonjour
Je lis les derniers développements d'hier et je vois que cela nous amène loin des éléments essentiels pour discuter d'éléments où aucune preuve ne peux être apporter (la corruption). Je ne vous suivrais pas dans cette voie. Il en va de même pour certaines affirmations comme la "forte" avation française. Ce n'est pas parce que je n'y réponds pas, part manque de temps, que je les accepte.
Bruno Roy-Henry a écrit: "Si la France continue le combat et que son gouvernement se replie en AFN, je vois mal Hitler repousser les offres espagnoles. Ce qui veut dire 100 000 espagnols prêts à attaquer au sud du Rif. Qu'est-ce que Noguès a sous la main pour leur faire face ?" Face à la limite interzonale, le 20 juin, Noguès dispose de 18 bataillons.
Bruno Roy-Henry a écrit: "Je dois dire que je suis ébranlé... Il est certain que si nous avons la certitude que Franco comptait passer à l'action, avec l'accord d'Hitler, il devenait impossible d'envisager sérieusement la défense de l'AFN. Surtout par le fait qu'il y avait déjà 100 000 espagnols dans le Rif, prêts à franchir la frontière !" Les uchronies sont des jeux intellectuels. Elles n'ont aucune valeurs historiques car elles ne peuvent ni prouver, ni démontrer.
dhouliez a écrit: "Dans l'analyse que les dirigeants pouvaient faire en juin 40, il me semble qu'une conjonction d'intérêts entre l'Italie et l'Espagne - se partager la Méditerranée - est beaucoup plus logique que Mussolini voyant d'un mauvais œil que Franco le débarrasse de Gibraltar, s'octroie le Maroc et l'Oranais, et lui laisse la Tunisie, le Constantinois, voire l'Algérois.." De mémoire, il me semble que Mussolini souhaitait avoir un port, une base navale sur l'Atlantique et qu'il avait envisagé Tanger.
Loïc M. a écrit le " "Ce que l'Espagne aurait pu faire si" ne vous semble peut-être pas important, mais me semble au contraire fondamental si on envisage que la France continue le combat (et pas qu'à moi, visiblement, vu la réponse de L. Martel)." Non ce qui m'intéresse c'est "ce que l'Espagne aurait pu faire", sans le si.
Loïc M. a écrit le 20 Août 2020 a 19:15 "Avant même l'acceptation formelle de la délégation française (qui a des ordres précis sur ce qu'elle peut accepter ou pas), Hitler rejette les demandes de Franco. Et Franco n'insiste pas." La réponse officieuse à lieu le 19 juin et l'officielle le 25 juin. Désolé, mon "calendrier" n'est pas complet.
Loïc M. a écrit le 20 Août 2020 a 19:15 "J'ai lu Michel Catala." Permettez-moi d'en douter.
Loïc M. a écrit le 20 Août 2020 a 19:15 "Mais quid de l'ampleur de les revendications de Franco ? N'est-il pas permis de penser que ces revendications étaient volontairement démesurées pour 1) soit entraîner un refus allemand, mais avec l'avantage de tout de même s'être positionné dans le "bon" camp 2) soit bénéficier de l'aide allemande, seule à même d'arriver à concrétiser ces exigences ?" Non, la proposition de Franco du 19 juin est claire : entrée en guerre contre acceptation des revendications espagnoles, l'un est liée à l'autre et vice versa. Comme vous l'avez fait remarqué plusieurs fois, la situation de l'Espagne est très difficile. Le retrait des forces espagnoles à partir du 20 juin montrent que pour Franco seule la garantie de voir ces revendications satisfaites rends une entrée en guerre payante. Il n'y a pas de demi-mesure possible. L'Espagne ne rentra pas en guerre pour moins.
Loïc M. a écrit le 20 Août 2020 a 19:15 "On peut penser que Hitler est à ce point certain (ou bien informé ?) que les Français vont accepter ses conditions qu'il exige que Franco arrête ses gesticulations pour ne pas mettre de l'huile sur le feu ou alors parce que ces gesticulations auraient atteint leur but (faire peur aux Français). Ou bien Hitler refuse la proposition espagnole car il n'en maîtrise pas l'issue, n'ayant aucun moyen à cette date de participer à la prise des territoires français d'Afrique du Nord (et donc sans garantie qu'il en retirera un bénéfice)." et "Alors oui, je maintiens que les Espagnols ont fait monter les enchères (d'où le terme "gesticulations", qui vise aussi bien Berlin que les Français) selon le calendrier que vous indiquez." Abandonnez votre idée de gesticulations. Si Hitler dit oui le 19 juin, Franco doit entrer en guerre sinon la garantie n'est plus valable et comme il est le demandeur, il n'y a aucune raison de penser qu'il n'ira pas jusqu'au bout.
Loïc M. a écrit le 20 Août 2020 a 19:15 "Je rappelle une lecture utile pour ceux qui estiment que la conquête de l'AfN aurait été une formalité : "La France pouvait continuer la guerre en Afrique du Nord" (Albert Merglen, 1992, revue "Guerres mondiales et conflits contemporains"), qui s'appuie sur une bibliographie essentiellement allemande." Merglen traite la question de l'Espagne en six lignes : "Aide de l'Espagne en 1940 à Hitler: à l'époque, pays du tiers-monde, ravagé par des années de guerre civile, une armée dans des conditions lamentables: 61 divisions d'armements hétéroclites ramenées à moitié (rapport allemand du 10 août 1940). Refus de Franco à Hitler, Canaris, Mussolini, et par écrit. Route unique, voie ferrée unique à faible débit vers le sud méditerranéen. Rapports allemands nombreux sur l'instabilité du gouvernement et la médiocrité des forces armées espagnoles." C'est un bel exemple de la façon dont est nié toute possibilité de menace de la part de l'Espagne et que Merglen est très mal informé de la réalité de cette menace en juin 1940.
Loïc M. a écrit le 23 août 2020 à 15:47 "Et si l'Espagne fait à son tour le coup du poignard dans le dos (fermant qui plus est potentiellement l'accès à la Méditerranée), les USA vont toujours rester isolationnistes ?" La défaite de alliés à fait évoluer la position américaine et une partie de l'opinion, mais assez pour que les USA entrent en guerre, il a fallut l'agression nipponne et la déclaration de guerre d'Hitler puisque les USA n'ont déclaré la guerre qu'au Japon.
Cordialement |
| | | dhouliez Admin
Nombre de messages : 9112 Date d'inscription : 21/11/2006
| Sujet: Re: Une résistance à la russe en France ? Lun 24 Aoû 2020 - 13:53 | |
| Bonjour,
Tout de même, sur l'efficacité supposée de la corruption...
L'intérêt de mon résumé très court était de montrer qu'entre la décision de mettre en place une action de corruption et le moment où cette action de corruption est censée avoir porté ses fruits, se place la séquence Hitler-Franco qui suffit par elle-même à expliquer le remplacement de Yagüe.
En faire un argument montrant l'influence des Anglais sur Franco est donc particulièrement spéculatif.
Pour ce qui est de la division australienne, elle n'est ni correctement entraînée ni équipée, ça ne fait donc que confirmer ce que je disais sur l'impossibilité de renforcer l'AFN avec des personnels formés et équipés. D'autant qu'il n'y a pour le moment aucune trace que cette unité ait été envisagée pour renforcer l'AFN. Après la déclaration de guerre de l'Italie, la logique veut même qu'elle renforce en priorité l'Egypte.
Cordialement, DH |
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